RENCONTRE DE LA PIETE ET DE L'HISTOIRE
EGLISE SAINT-SULPICE, FOUGERES
Notre-Dame des Marais dans sa parure royale à l'occasion du pardon 2006. (cliché Sr Hélène R.) |
LA DECOUVERTE DE LA STATUE
La statue de Notre-Dame des Marais est vénérée à Fougères depuis le XIVe.L’origine de ce culte est auréolée de légendes : ensevelie sous les décombres de la chapelle Sainte-Marie du château au cours de la prise de Fougères par Henri II Plantagenêt en 1166, elle aurait été retrouvée au début du XIVe près des fossés marécageux du château, lors de travaux d’agrandissement de l’église primitive.
Un vitrail de Payan et Guyonnet daté de 1901 a ancré dans le verre la découverte providentielle : sous le regard ébloui des princes de la maison de Fougères, du clergé régulier et séculier et des terrassiers, les trois ordres de la société médiévale,la statue apparaît dans une blancheur surprenante, intacte...
Notre-Dame des Marais dont l’histoire a été longuement contée par le vicomte Le Bouteiller est une Vierge allaitante de la fin du XIVe. Cette image attendrissante de Marie nourricière est l’objet d’une grande vénération au Moyen Age. Elle exalte le rôle maternel et protecteur de Marie en même temps qu’elle met en valeur l’intimité charnelle entre l’humain et le divin. Les visages ont été refaits au XVIIIesiècle sans doute par le sculpteur fougerais Antoine Viollard, auteur talentueux des statues du chœur. Pourtant cette réfection partielle n’est pas des plus habile : l’expression manque un peu de naturel et l’enfant Jésus semble excessivement joufflu et mal proportionné, ces petits défauts n’ont jamais altéré la piété populaire, loin s’en faut…
DES SIECLES DE DEVOTION
La statue est très vite vénérée, d'abord à l'extérieur de l'église dans un petit oratoire puis dans la chapelle Notre-Dame édifiée par la confrérie de la Mi-Août consacrée au début du XVè et desservie par sept chapelains, puis à nouveau à l'extérieur, pour une dévotion plus libre... Pendant plusieurs siècles, les pélerins affluent de loin, d'autant plus nombreux qu'on prête à la Vierge des pouvoirs miraculeux de guérison.
Selon le vicomte Le Bouteiller, même au cours de la période révolutionnaire, la dévotion ne faiblit pas malgré les interdictions officielles ; l’oratoire est fermé au culte, la statue est achetée par un paroissien et elle continue à être honorée chez lui. Au début du XIXe, elle regagne son oratoire.
La chapelle néogothique Notre-Dame des Marais
(Archives municipales, Fougères)
Au cours des années 1869-1872, l'architecte Tourneux le remplace par une grande chapelle néo-gothique, édifiée en pierre de Caen. Jugée inesthétique car elle formait un appendice peu harmonieux dont la couleur blanche rompait l'unité du granit sur le collatéral nord, elle est détruite en 1960 par la volonté des Monuments Historiques.
C'est alors qu'elle est placée devant le grand retable gothique de la chapelle Notre-Dame où les Fougerais la prient aujourd'hui.
LE COURONNEMENT
Le Couronnement de Notre-Dame des Marais a été célébré en grande pompe le 8 septembre 1923 dans l’enceinte du château devant une assemblée considérable : le Journal de Fougères avance le chiffre de 20000 personnnes.Il est entré dans l’histoire de la cité.
La faveur du couronnement avait été sollicitée près du Pape par le chanoine Mathurin, curé de Saint-Sulpice, en 1922. Le jour choisi est celui de la fête mariale de la Nativité. La célébration comporte un premier cortège de l'église au château, une grand'messe pontificale, le panégyrique de Notre-Dame, le couronnement solennel avec les couronnes d'or offertes par les Fougerais - la tradition raconte qu'elles ont été fondues avec les bijoux des paroissiennes et donatrices; après les vêpres , la procession se dirige vers les églises N-D de Bonabry et Saint-Léonard à travers les rues pavoisées , au milieu d'une foule inimaginable :"50000 étrangers, pour le moins, étaient venus" affirme le même journal sans doute peu sourcilleux sur l'exactitude... Il est vrai qu'on avait prévu des trains spéciaux partis de Vitré, Saint-Malo,Coutances, Vire et Mortain. Et tous fredonnent le cantique populaire composé pour la circonstance, dans lequel se croisent assez curieusement la piété et l'histoire teintée de légende...
Cantique du Couronnement, dans sa première version, ici incomplète. |
Enfin la fête se termine au château par un retentissant Te Deum et la vieille cité s'illumine...
Procession du Couronnement, Archives municipales. |
LE PARDON DE NOTRE-DAME DES MARAIS
Pour perpétuer cet hommage et donner plus de solennité à la dévotion mariale, le curé de Saint-Sulpice institue en 1924 la célébration du Pardon. Cette tradition est toujours respectée. Le dernier dimanche de septembre, la statue est revêtue de son manteau de sacre fleurdelisé et doublé d'hermine dont les mouchetures rappellent, pour les Fougerais du moins, l'appartenance bretonne si présente sur le retable du duc de Bretagne de l'actuelle chapelle Notre-Dame des Marais.
La paroisse renoue avec un rite pluriséculaire : l'habillement de la statue, attesté dès le XVe dans les archives de Saint-Sulpice. Marque de vénération ou rite d'appropriation du sacré, cette coutume très anthropomorphique et fusionnelle de la parure remonte aux pratiques cultuelles antiques.
La Vierge et l'Enfant sont coiffés de leurs couronnes précieuses, autrefois dessinées par l'historien Henri Le Bouteiller ou du moins de leur réplique. Même si la foule est moins dense,la procession se déroule toujours dans le quartier,comme pour se réapproprier chaque année l'espace spirituel.Les couplets du cantique marial ont été modérés mais la mélodie douce est toujours chantée avec la même ferveur.
Pour perpétuer cet hommage et donner plus de solennité à la dévotion mariale, le curé de Saint-Sulpice institue en 1924 la célébration du Pardon. Cette tradition est toujours respectée. Le dernier dimanche de septembre, la statue est revêtue de son manteau de sacre fleurdelisé et doublé d'hermine dont les mouchetures rappellent, pour les Fougerais du moins, l'appartenance bretonne si présente sur le retable du duc de Bretagne de l'actuelle chapelle Notre-Dame des Marais.
Parure du Couronnement et du Pardon. |
La Vierge et l'Enfant sont coiffés de leurs couronnes précieuses, autrefois dessinées par l'historien Henri Le Bouteiller ou du moins de leur réplique. Même si la foule est moins dense,la procession se déroule toujours dans le quartier,comme pour se réapproprier chaque année l'espace spirituel.Les couplets du cantique marial ont été modérés mais la mélodie douce est toujours chantée avec la même ferveur.
En dépit
des vents contraires, le culte de Notre-Dame des Marais empreint de
merveilleux, de tradition et de foi sincère est resté profondément ancré dans
la mémoire collective fougeraise et il est solidement entretenu par les paroissiens
de Saint-Sulpice.
Passage du discours , bien inscrit dans l'Histoire de Fougères, prononcé
par le chanoine Mathurin lors du banquet du Couronnement, rapporté par
Le Nouvelliste de Bretagne, relayé par le Journal de Fougères, 15 -09-1923.
Archives municipales.
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