mercredi 27 février 2013

Ferdinand de LA RIBOISIERE, homme politique, pionnier du progrès agricole



   LE COMTE FERDINAND DE LA RIBOISIERE                   
(1856-  1931)
                                    
 
                   




 
 





 
 


  A la fin du XIXème siècle, le Comte Ferdinand de La Riboisière, petit-fils du célèbre général de Napoléon, fait figure dans le pays de Fougères d’un personnage politique respecté et d’un pionnier en matière d’agriculture.
Il fait construire des fermes-modèles, équipées d'hygiène et de confort selon ses préceptes de salubrité et de propreté ce qui, à l'époque, est tout à fait révolutionnaire.
     Ferdinand de La Riboisière est né le 1er janvier 1856. Son père, Honoré de La Riboisière est le fils du général Jean Baston de La Riboisière, commandant en chef de l’Artillerie de Napoléon.




 Le château de Monthorin à Louvigné-du-Désert(cl M.Hodebert)









    Ferdinand, issu du second mariage de son père, ne connut pratiquement pas sa mère puisque celle-ci mourut six jours après sa naissance.Il poursuivit ses études au lycée Fontanes à Rennes puis il devint officier dans l’armée d’où il démissionna en 1880 afin de retrouver son château de Monthorin et de s'occuper de son domaine.                                    
 
Il se trouve  alors à la tête d'une importante fortune et ses domaines s'étendent à Louvigné-du-Désert mais aussi à Javené où quantité de fermes lui appartiennent. Le comte de Lariboisière n'est-il pas le principal propriétaire foncier de la commune ?
La "Note sur l'exploitation du domaine de Monthorin" pour l'année 1892 précise que le domaine a une étendue de 1600 ha dont 951 sont exploités par des fermiers.



                UN HOMME POLITIQUE

 

  
                     

          L’étude de M. Michel Cointat sur les députés de Fougères nous apprend que Ferdinand de La Riboisière se lance aussi dans la politique afin de succéder au député Augustin Riban. Il se présente sous l’étiquette républicaine – bien que son cœur soit bonapartiste, ce qui se comprend aisément – contre le Comte de La Villegontier, candidat des Conservateurs. « Je suis républicain, dit-il, je veux la République modérée et je suis respectueux des grands principes sociaux ». Le duel est sévère mais Ferdinand de La Riboisière est élu député le 30 avril 1882, à l’âge de 26 ans[1] sans contestation possible. Il démissionne en 1886, et est remplacé par René Le Hérissé.
     L'année suivante, en 1883, il est élu conseiller général du canton d'Antrain,poste qu'il occupe pendant 43 ans.En 1886,il est élu Maire de Louvigné-du-Désert. Ferdinand de Lariboisière  s'occupe beaucoup plus de sa circonscription que du Palais-Bourbon où il intervient peu. De 1909 à 1919, il est  sénateur d'Ille-et-Vilaine avant d'être à nouveau réelu député  après une éclipse de 34 ans.Réelu député en 1924, il quitte la politique en 1928. 



UN  PASSIONNÉ D’AGRICULTURE



A son époque, Ferdinand de La Riboisière fait figure, nous l’avons dit, de pionnier en matière d’agriculture. Il est, le premier à conseiller la récupération du purin pour engraisser les terres et à faire expérimenter de nouveaux engrais.Bousculant, non sans mal, les habitudes ancestrales de ses fermiers, il fait appliquer sur ses terres les méthodes de culture les plus récentes et modernise les nombreuses  exploitations agricoles dont il est propriétaire. La gestion de chaque ferme est rigoureuse, une comptabilité très suivie détaille par le menu tous les revenus et la production (lait, beurre, animaux, etc...), le tout est consigné dans un bilan comparatif général mensuel et annuel de « l’Exploitation Agricole du Domaine de Monthorin » qui comprend les laiteries de Monthorin et de Javené auxquelles sont rattachées les fermes du comte.




Ferme de la Corbelière, Javené.


    Il fait construire des fermes-modèles où l'hygiène et la salubrité sont, selon lui, la clé de la réussite. Les étables sont spacieuses,pavées et aérées; l'évacuation du fumier est facilitée par la possibilité d'y faire entrer un tombereau et le purin s’écoule dans une fosse attenante sur laquelle est construit le cabinet d’aisance, ce qui est très  nouveau à l’époque. L'aspect extérieur est toujours  soigné: les baies , souvent cintrées, et les chaînages d'angle sont en pierre de taille de granite local ou en brique.


 
 
L’élevage des jeunes animaux qui, entre 1850 et 1878, a donné de grands bénéfices, n’est plus rentable en 1892. La Riboisière décide de réorganiser son domaine agricole en augmentant la production laitière, seule activité rémunératrice dans la région à l’époque.

Le comte de La Riboisière, devenu Président de la Société Départementale d’Agriculture d’Ille et Vilaine, observe que le sol de l’arrondissement de Fougères a une prédominance granitique, tantôt de sable, tantôt d’argile, que le climat humide et tempéré y favorise une herbe fine et légère, abondante et de bonne qualité tant dans les prairies naturelles qu’artificielles.

Il constate également que, depuis 1840, les cultivateurs ont restreint   avec raison, dit-il, les emblavures de céréales et ont augmenté l’étendue des herbages.Il introduit dans ses fermes des vaches de race jersiaise dont le lait est plus riche en matières grasses. Dans le but de développer une industrie beurrière, il fait installer deux laiteries, une à Monthorin et l’autre à la Grande-Marche, montées selon un système danois très moderne pour l’époque qui fonctionne à la vapeur. Chaque jour, les fermiers y apportent le lait de leurs « jersettes », comme ils disent.

   Ferdinand de Laiboisière est de toutes les manifestations agricoles, il assiste à tous les comices du pays. Devant, là aussi, montrer l’exemple, il invite ses fermiers à présenter leurs bêtes aux concours régionaux, voire nationaux, dans lesquels nous les voyons obtenir de très nombreux 1er prix. C'est  ainsi que le Domaine de Monthorin obtient le Prix Behague de la Société Nationale d’Agriculture de France en 1892 après avoir reçu deux médailles d’or à l’Exposition Universelle de Paris en 1889.



Laiterie et étable de Monthorin.


Intérieur de l'étable: aérations multiples, plafond  en voûtains de briques vernissées, soutenu par des piliers métalliques, pavage de terre cuite...



            LA  RENOMMEE DU BEURRE

  

      En 1880-1881, la valeur du beurre produit sur les fermes Lariboisière est de 1.622,20 F. Cette valeur passe à 9.346,35 F pour l’exercice 1888-1889 ; valeur calculée selon le prix de vente aux halles centrales de Paris, défalcation faite des droits de transport, d’octroi et de commission. La production beurrière est très rentable à cette époque. Le beurre du Pays de Fougères et, plus spécialement, celui produit par les deux laiteries du comte de La Riboisière, sont exportés vers la capitale.

      Finalement, les concepts de La Riboisière  ont stimulé les agriculteurs vers le progrès et contribué à un certain renouveau  de l’agriculture dans notre région.

 
          UNE GESTION RIGOUREUSE
 

 

Un bilan d’exploitation et un bilan financier sont établis chaque année pour chaque ferme du domaine.On y voit ainsi la progression et les résultats obtenus par les fermiers.  D’après ces résultats, seront calculées la part du propriétaire, celle du fermier et aussi celle des serviteurs et employés qui reçoivent, en plus de leurs gages, 6% de cette valeur. Participant au bénéfice de l’exploitation, les fermiers sont d’autant plus motivés pour obtenir un meilleur résultat.

 


L'ancienne ferme de la Grande Marche où le comte de Lariboisière 
 installa sa laiterie de Javené.



UNE ŒUVRE SOCIALE


 En avance sur son temps Ferdinand de La Riboisière croit sérieusement à son œuvre de modernisation. Il veut en faire également une œuvre sociale : ses fermiers participeront aux bénéfices.Il obtient de ses fermiers et de leurs serviteurs un concours intelligent et actif en les faisant associer leurs intérêts à ceux du propriétaire par la signature d’une convention.Le fermier n'a plus de prix de location à payer et tous les produits de la ferme lui sont laissés, sauf ceux de l'étable que l'on partage. Il doit diriger son exploitation de manière à produire le plus de lait possible...La somme annuelle qui est remise au fermier, comme prix du lait, est au moins égale au montant du fermage antérieur. Ainsi, un fermier qui avait une location de 1000 francs n'a plus rien à payer et est sûr de toucher au moins 1000 F. de son propriétaire... 



                    


Le comte de Lariboisière au milieu de ses employés à Monthorin
 en Louvigné-du-Désert.

 


         



              

       Des sommes sont versées à la Caisse Nationale des Retraites pour la vieillesse et le capital reste aliéné en rentes viagères incessibles et insaisissables avec jouissance des titulaires à l’âge de 55 ans, ce qui est une avancée sociale appréciable pour l’époque qui ne devait pas laisser indifférent.

 


  



         La comtesse de La Riboisière au milieu des soldats blessés  accueillis à Monthorin  pendant la Guerre 1914-1918.

      Son épouse,la comtesse de Lariboisière, née Marguerite Rhoné (1864-1933)ouvrit un hôpital militaire à Monthorin pendant la Guerre 1914-1918. Elle fut décorée de la Médaille d'Honneur  pour Belles actions et de la médaille de la Reconnaissance Française.

      Ferdinand de La Riboisière meurt à Paris le 3 mai 1931 – Son corps est ramené à Monthorin afin d’y être inhumé dans le caveau familial. Les anciens Louvignéens et Javenéens se souviennent encore très bien de lui et aussi de son fils, Jean, figure locale particulière en raison de son obésité.Il était le dernier héritier d’une famille unanimement respectée,ses libations entraînèrent sa déchéance. A sa mort, tout le patrimoine des La Riboisière fut vendu et dispersé.



 
Chapelle funéraire de la famille  de la Riboisière à Monthorin.


     Sur la commune de Louvigné-du-Désert, près d'une trentaine de fermes  ont porté la marque du comte de Lariboisière.
     A Javené, 15 fermes lui ont appartenu.Toutes ces fermes existent encore à l’exception de celle du Petit-Bois-Benier qui fut ravagée par un incendie et qui ne fut pas reconstruite.Quatorze "fermes Lariboisière" émaillent donc encore le paysage de Javené. Vous les reconnaîtrez à leur longue étable aux ouvertures apparemment toutes semblables...

                                          Marcel Hodebert.

 
       Clichés de  l'auteur et de la collection des Archives de Fougères.
      Droits réservés.


1] « La première campagne électorale de Ferdinand de La Riboisière » - de Marcel Hodebert, in Bulletin et Mémoires de la Société Historique et Archéologique de Fougères -


  Pour visiter en image  le domaine de Monthorin sur le site de l'Inventaire du Patrimoine régional, cliquez sur ce lien:



http://patrimoine.region-bretagne.fr/sdx/sribzh/main.xsp?execute=show_document&id=MERIMEEIA35048673

                      Fermes Lariboisière de Louvigné-Communauté


Vignette








 






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vendredi 8 février 2013

J-B. LE TAILLANDIER et ANNE BOIVENT, CO-FONDATEURS de la CONGREGATION de RILLE

 2015 :150è anniversaire 
    -Ouest-France, 1avril 2015 p.13 
     - Interview:
http://rennes.catholique.fr/Le-15-aout-les-Soeurs-du-Christ.html


 Anne Boivent, Jean-Baptiste Le Taillandier


 DEUX VIES  DE SERVITEURS REMISES EN LUMIERE







        DESTINS CROISES





       Jean-Baptiste Le Taillandier (1788-1870) est originaire du quartier de Saint-Sulpice à Fougères ; ses parents, commerçants, habitaient rue de La Pinterie, tout près du château. En 1810, il entre au Séminaire de Rennes et est ordonné prêtre quatre ans plus tard. La paroisse de Saint-Georges-de-Reintembault est sa première affectation, c'est là qu'il rencontre ANNE BOIVENT, elle-même née en 1787 à Saint-Georges, servante des enfants qu'elle instruisait et des déshérités qu'elle tentait d'aider dans cette période de grande précarité.
       En 1817, il quitte Saint-Georges  pour Dompierre-du-Chemin  où il est vicaire pendant près de deux ans. Là, beaucoup de paroissiens sont analphabètes, il fait alors venir Anne Boivent pour le  seconder : une petite école est ouverte près du presbytère.




         UNE  ETAPE DECISIVE : LAIGNELET





Bourg de Laignelet, la petite maison des origines.  


      Mais, au printemps 1819, l'abbé Le Taillandier devient recteur de Laignelet. L'instruction des jeunes, mal assurée, le  préoccupe aussi demande-t-il, en 1823, à Anne Boivent d'organiser l'éducation des enfants de Laignelet. Dans une masure étroite dont le petit grenier sert de dortoir,elle  conseille bientôt  une douzaine de jeunes filles éprises de spiritualité .Son rayonnement et son abnégation les attirent.

     Anne Boivent se sent appelée à   promouvoir "l'adoration et l'amour de la Justice de Dieu". Jean-Baptiste Le Taillandier accueille cette intuition spirituelle.Le contexte historique du renouveau catholique est d'ailleurs favorable à l'éclosion de nombreuses Congrégations.
     En 1830,il écrit une première Règle et, l'année suivante, la Congrégation des Soeurs Adoratrices de la Justice de Dieu reçoit l'agrément de l'évêque. Deux petites communautés se forment  déjà à Fougères et à Vitré .



    L'ELECTION  DU SITE DE RILLE



     En 1833, Jean-Baptiste Le Taillandier, qui n'a pas beaucoup d'argent, prend le risque d'acheter à Jean-Marie de La Mennais l'abbaye Saint-Pierre de Rillé à l'état de ruines depuis la Révolution. Les  obstacles s'accumulent mais des bienfaitrices soutiennent son choix. Les premières soeurs, peu nombreuses, s'installent dans les décombres de l'abbaye. L'année suivante, l'abbé Le Taillandier quitte la paroisse de Laignelet et se met au service de la nouvelle Communauté de Rillé dont Anne Boivent est devenue  naturellement la Supérieure.








    L'ESSOR DES OEUVRES SOCIALES

      Au cours du mois d'octobre 1833, les religieuses ouvrent leur porte aux "Incurables" : elles accueillent  les pauvres et les infirmes et y ouvrent un premier hospice en 1846.

     L'aide aux Sourds-Muets s'organise dès cette  même  année dans les locaux de l'abbaye, par la volonté d'Anne Boivent et de l'abbé Le Taillandier. Cette oeuvre novatrice, vite reconnue ,va connaître le développement que l'on sait.
     




Rillé : accueil des  sourdes-muettes.



       Dès 1840, dans les premières écoles, l'instruction est assurée par les soeurs et les   institutions d'enseignement essaiment rapidement dans l'Est du département  comme autour de Rennes,  surtout après 1850, à la faveur de la loi Falloux. Soixante-dix-huit écoles sont créées en trente -ans...









     Les maisons de repos ou hospices s'ajoutent à l'action sociale et éducative des soeurs : elles fondent, avec l'aide financière de donatrices,les hospices de Louvigné-du-Désert (1862) et de Chaudeboeuf (1863). D'autres vont suivre.


Hospice de Chaudeboeuf, ancien château de Mme de  La Haye-Saint-Hilaire,
donné à la congrégation pour le service des enfants pauvres et inadaptés.



    Jean-Baptiste Le Taillandier accompagne l'évolution de la congrégation et entretient par ses conseils et ses écrits le souffle spirituel qui inspire ses actions ; il s'éteint à Rillé en 1870, cinq ans après Anne Boivent.



La colline de Rillé, vue des remparts de la Pinterie .


     L'oeuvre des fondateurs continue : elle s'est déployée dans plusieurs régions de France, elle est présente aux Pays-Bas, au Burkina-Faso et depuis quelques années au Congo. Depuis 1833 , plus de 2300  soeurs ont  entendu le message de Anne Boivent et Jean-Baptiste Le Taillandier. 
                                             J.P.G.


       Pour une biographie plus complète,on pourra se référer aux ouvrages hagiographiques parus  en décembre 2012,réalisés par les Soeurs Anne Mouazan et Hélène Rubion:
 Vie de Anne Boivent et Vie du Père Jean-Baptiste Le Taillandier.   
 
    

                               Clichés: Archives de Rillé.
                                                     Droits  réservés.










  http://rennes.catholique.fr/Le-15-aout-les-Soeurs-du-Christ.html

vendredi 1 février 2013

FALLAIT-IL RASER LES URBANISTES?


LE COUVENT DES URBANISTES

 aujourd'hui CENTRE CULTUREL













RETROSPECTIVE






     Le Couvent des Urbanistes a été construit entre 1680 et 1689 pour les religieuses Clarisses arrivées à Fougères dès 1633. Cet ordre mendiant avait été crée en 1213 par sainte Claire, sœur de François d’Assise, lui-même fondateur de l’ordre des Frères mineurs ou franciscains.

      Les Clarisses dites Urbanistes avaient obtenu en 1263 du Pape Urbain IV un allègement de la Règle leur permettant de posséder des biens en commun et d’avoir des revenus réguliers pour assurer leur subsistance.

      Installées d’abord dans une maison de Bonabry en 1633 avec l'agrément du Pape Urbain VIII (bulle du 29-11-1634), puis au Clos-Morel sur le site de la Retraite, les Urbanistes, dites aussi les « Dames Sainte-Claire »,font édifier leur couvent dans un champ situé en la paroisse de Laignelet, nommé « le Champ aux Belles Femmes »,cédé par M. Le Jeune, sieur de la Tendrais en Parigné, dont la fille était religieuse.

       Les Urbanistes se recrutaient dans les familles de la bonne bourgeoisie et de la noblesse. Les filles d’origine plus modeste étaient admises comme sœurs converses et assuraient les tâches ménagères. Parmi elles, Jeanne Le Royer (1731-1798) dite Sœur de la Nativité, originaire de La Chapelle-Janson, s'est singularisée par son mysticisme et sa prescience de l'avenir ; ses visions et ses prophéties ont été rapportées par le Père Genest, alors chapelain des Urbanistes.

     Le 27 septembre 1792, les religieuses furent expulsées du couvent par les autorités révolutionnaires.




UNE ARCHITECTURE CLASSIQUE


Le chevet de la chapelle et le logis de l'abbesse.(cl. Archives municipales, Fougères)

   L'ensemble présente une remarquable unité et une sobriété très classique. L'édifice élevé sur deux étages est rythmé par des lucarnes aux frontons triangulaires et curvilignes alternés. Le cloître est éclairé par neuf arcades surbaissées sauf sur l'aile-Est, inachevée.
    Au centre de la façade-Sud, s'ouvrent deux portes cintrées superposées, correspondant au rez-de-chaussée et à l'étage ; elles sont disposées dans un discret avant-corps de granit appareillé et soulignées par un beau jeu d'arcatures ; le couronnement de cette entrée monumentale porte un médaillon martelé cerné par une ceinture de sainte Claire.



Poinçon de charpente d'époque, Ecole de dessin.

LES CANTONNEMENTS MILITAIRES


    Pendant la période révolutionnaire, le couvent des Urbanistes échappe à la vente comme bien national, il est mis à la disposition de la ville pour y loger les nombreuses troupes de passage, envoyées pour rétablir l'ordre et pacifier le pays.

    Jusqu’en 1815, le couvent reçoit des cantonnements de troupes de passage qui commettent de nombreuses dégradations. Pour comble de malheur, cette même année, un ouragan détruit 150 m² de toitures et les troupes prussiennes d’occupation marquent leur passage.

    Un rapport de l’autorité militaire, en 1816, précise que la caserne est « dans un état de délabrement qui la rend absolument inhabitable » . Des travaux s’imposent si la municipalité veut obtenir, comme elle l’a maintes fois demandé, l’implantation d’un régiment à Fougères. Elle fait alors réaliser, entre 1816 et 1818, les réparations nécessaires et, en 1821, un régiment de Chasseurs arrive aux Urbanistes. La Ville met à sa disposition une pièce de terre pour lui servir de champ de manœuvres.

     Aux Urbanistes, se succèdent ensuite plusieurs compagnies d’Artilllerie, des régiments du Génie et de Cavalerie jusqu'au milieu du XIXe.



       LE TRAIN DES EQUIPAGES


    Le 12 avril 1874, Fougères est choisie comme ville de garnison pour les troupes du Train des Equipages, régiment de cavalerie légère du 10èmeCorps d’Armée. Ce régiment restera à Fougères jusqu’à la Guerre de 1914-1918, écrivant, 40 années durant, une page d’histoire de la ville.

    Pour le dépôt du matériel, la Ville achète un terrain de deux hectares au Chêne Vert, lieu encore connu sous le nom de « l’Annexe » où s’élèvent diverses constructions dont il ne reste plus aujourd’hui que le grand bâtiment administratif réhabilité en logements et un des deux petits pavillons de l’entrée. Pour mémoire, en 1921, l'abbé Bridel loue à l'Armée les locaux désaffectés des granges à matériel et à fourrage pour y installer la nouvelle Cristallerie, près du Chêne-Vert.

   Les« Tringlots » comme les appelaient familièrement les Fougerais font partie intégrante de la vie de la cité. Les cavaliers sillonnent la ville et la campagne environnante et participent aux manifestations festives ou aux opérations de maintien de l’ordre public, comme au moment des Inventaires des églises en 1906. La rue de la Caserne est constamment encombrée par les allées et venues des militaires, des chariots de la caserne, les approvisionnements de fourrage… Les permissions de militaires font grand bruit dans les parages... Puis les « Tringlots » laissent la place aux gardes mobiles qui occupent la caserne des Urbanistes de 1924 à 1940.





Le vaisseau de la chapelle des religieuses a été coupé en deux par un plancher, la pièce inférieure servait d’écurie, la pièce supérieure de logement. Les anciennes verrières ont été murées, d’autres fenêtres ont été ouvertes, le clocher a disparu.(Archives municipales, Fougères).








Un appentis crépi à chaux s'est appuyé sur le logis abbatial à droite ; au cours de la restauration, on a reconstruit la quatrième travée, beaucoup plus heureuse.




Certaines arcades du cloître ont été fermées par un mur pour servir d'écuries.




Bonheur estival.(Archives municipales,Fougères)







Après la Seconde Guerre mondiale, la Ville, très éprouvée par les bombardements alliés de 1944, revendique en 1949 la propriété de la caserne des Urbanistes afin d’y loger des réfugiés et des personnes sans-toits. Elle s’en porte acquéreur en 1957 mais n’en prend possession qu’en 1959. En 1961, elle cède gratuitement l’ancien couvent à l’Office public d’H.L.M. qui élève bientôt sur le site plusieurs immeubles.






En 1965, le couvent-caserne est complétement défiguré et délabré : la municipalité décide de le démolir pour libérer l'espace. Mobilisés par Albert Bourgeois, pharmacien et conseiller municipal, quelques Fougerais s'opposent à sa démolition ; leur cause est entendue par le Ministre de la Culture, André Malraux qui, le 15 juillet 1965,interdit in extremis la destruction du couvent.



 Ouest-France.Archives municipales de Fougères.





Plusieurs projets de remise en état sont abandonnés. Enfin la restauration complète est décidée en 1971 par la municipalité M. Cointat ; orchestrée par Raymond Cornon, architecte des Monuments Historiques, elle s'étale sur 15 ans. En 1986, les Fougerais découvrent un édifice dont ils ne soupçonnaient pas le prestige...




Vitraux de la chapelle, oeuvre de l'atelier Job Guével, composition sur le thème de la forêt
 sur dessin de l'artiste Maria Vieira Da Silva.Paysagisme abstrait.


     Dès 1978, l’Ecole de Musique prend possession de ses nouveaux locaux, bientôt rejointe par l’Ecole de Dessin et la galerie d'Art Contemporain Arcade qui y accueille les artistes jusqu'en 2009.

    A la fin de l'année 2004, les H.L.M. qui masquent le monument sont démolis et les Urbanistes s'intègrent pleinement au patrimoine architectural de Fougères.





 Phase finale de la démolition des HLM, Archives municipales de Fougères.





     
L'esplanade libérée devant la façade Ouest.( Archives de Fougères)


La plupart des photographies du régiment de Cavalerie, ont été acquises en 2005 par la Ville de Fougères qui les a achetées à un photographe rennais M. Rapilliard; lui-même les avait négociées sur un marché sans savoir de quelle caserne il s'agissait . Ses investigations l'ont conduit par hasard à Fougères où l'archiviste Marcel Hodebert les a identifiées . Les négatifs ont été pris à l’intérieur même de la caserne par un photographe militaire. Cette collection de 67 plaques de verre, totalement inédites, date des années 1890-1910,elle donne une image volontairement détendue , parfois cocasse de la vie militaire et elle est un peu la mémoire de cet espace.


 
Textes: - Marcel Hodebert
            - Jean-Paul Gallais.

Mise en oeuvre de l'exposition aux Ateliers:
             - Jean Hérisset
             -service des Archives municipales.