(1856- 1931)
A la fin du XIXème siècle, le Comte Ferdinand de La Riboisière, petit-fils du célèbre général de Napoléon, fait figure dans le pays de Fougères d’un personnage politique respecté et d’un pionnier en matière d’agriculture.
Il fait construire des fermes-modèles, équipées d'hygiène et de confort selon ses préceptes de salubrité et de propreté ce qui, à l'époque, est tout à fait révolutionnaire.
Ferdinand de La Riboisière est né le 1er janvier 1856. Son père, Honoré de La Riboisière est le fils du général Jean Baston de La Riboisière, commandant en chef de l’Artillerie de Napoléon.
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Le château de Monthorin à Louvigné-du-Désert(cl M.Hodebert) |
Ferdinand, issu du second mariage de son père, ne connut pratiquement pas sa mère puisque celle-ci mourut six jours après sa naissance.Il poursuivit ses études au lycée Fontanes à Rennes puis il devint officier dans l’armée d’où il démissionna en 1880 afin de retrouver son château de Monthorin et de s'occuper de son domaine.
Il se trouve alors à la tête d'une importante fortune et ses domaines s'étendent à Louvigné-du-Désert mais aussi à Javené où quantité de fermes lui appartiennent. Le comte de Lariboisière n'est-il pas le principal propriétaire foncier de la commune ?
La "Note sur l'exploitation du domaine de Monthorin" pour l'année 1892 précise que le domaine a une étendue de 1600 ha dont 951 sont exploités par des fermiers.
UN HOMME POLITIQUE
L’étude de M.
Michel Cointat sur les députés de Fougères nous apprend que Ferdinand de La
Riboisière se lance aussi dans la politique afin de succéder au député Augustin
Riban. Il se présente sous l’étiquette républicaine – bien que son cœur soit bonapartiste, ce qui se comprend aisément – contre le Comte de La Villegontier,
candidat des Conservateurs. « Je suis républicain, dit-il, je veux la
République modérée et je suis respectueux des grands principes sociaux ». Le duel est sévère mais Ferdinand de La Riboisière est élu député le 30 avril 1882, à l’âge
de 26 ans[1]
sans contestation possible. Il démissionne en 1886, et est remplacé par René
Le Hérissé.
L'année suivante, en 1883, il est élu conseiller général du canton d'Antrain,poste qu'il occupe pendant 43 ans.En 1886,il est élu Maire de Louvigné-du-Désert. Ferdinand de Lariboisière s'occupe beaucoup plus de sa circonscription que du Palais-Bourbon où il intervient peu. De 1909 à 1919, il est sénateur d'Ille-et-Vilaine avant d'être à nouveau réelu député après une éclipse de 34 ans.Réelu député en 1924, il quitte la politique en 1928.
UN
PASSIONNÉ D’AGRICULTURE
A son époque,
Ferdinand de La Riboisière fait figure, nous l’avons dit, de pionnier en
matière d’agriculture. Il est, le premier à conseiller la récupération du purin
pour engraisser les terres et à faire expérimenter de nouveaux engrais.Bousculant, non sans mal, les habitudes
ancestrales de ses fermiers, il fait appliquer sur ses terres les méthodes de
culture les plus récentes et modernise les nombreuses exploitations agricoles dont il est
propriétaire. La gestion de chaque ferme est rigoureuse, une comptabilité très
suivie détaille par le menu tous les revenus et la production (lait, beurre,
animaux, etc...), le tout est consigné dans un bilan comparatif général mensuel
et annuel de « l’Exploitation
Agricole du Domaine de Monthorin » qui comprend les laiteries de
Monthorin et de Javené auxquelles sont rattachées les fermes du comte.
Ferme de la Corbelière, Javené. |
Il fait construire des fermes-modèles où l'hygiène et la salubrité sont, selon lui, la clé de la réussite. Les étables sont spacieuses,pavées et aérées; l'évacuation du fumier est facilitée par la possibilité d'y faire entrer un tombereau et le purin s’écoule dans une fosse attenante sur laquelle est construit le cabinet d’aisance, ce qui est très nouveau à l’époque. L'aspect extérieur est toujours soigné: les baies , souvent cintrées, et les chaînages d'angle sont en pierre de taille de granite local ou en brique.
L’élevage des jeunes animaux qui, entre
1850 et 1878, a donné de grands bénéfices, n’est plus rentable en 1892. La
Riboisière décide de réorganiser son domaine agricole en augmentant la
production laitière, seule activité rémunératrice dans la région à l’époque.
Le comte de La Riboisière, devenu
Président de la Société Départementale d’Agriculture d’Ille et Vilaine, observe
que le sol de l’arrondissement de Fougères a une prédominance granitique,
tantôt de sable, tantôt d’argile, que le climat humide et tempéré y favorise
une herbe fine et légère,
abondante et de bonne qualité tant dans les prairies naturelles
qu’artificielles.
Il constate également que, depuis 1840,
les cultivateurs ont restreint avec raison, dit-il, les emblavures de céréales et ont augmenté l’étendue des
herbages.Il introduit dans ses fermes des vaches
de race jersiaise dont le lait est plus riche en matières grasses. Dans le but
de développer une industrie beurrière, il fait installer deux laiteries, une à
Monthorin et l’autre à la Grande-Marche, montées selon un système danois très
moderne pour l’époque qui fonctionne à la vapeur. Chaque jour, les fermiers y
apportent le lait de leurs « jersettes »,
comme ils disent.
Ferdinand de Laiboisière est de toutes les manifestations agricoles, il assiste à tous les comices du pays. Devant, là aussi, montrer l’exemple, il invite ses fermiers à présenter leurs bêtes aux concours régionaux, voire nationaux, dans lesquels nous les voyons obtenir de très nombreux 1er prix. C'est ainsi que le Domaine de Monthorin obtient le Prix Behague de la Société Nationale d’Agriculture de France en 1892 après avoir reçu deux médailles d’or à l’Exposition Universelle de Paris en 1889.
Intérieur de l'étable: aérations multiples, plafond en voûtains de briques vernissées, soutenu par des piliers métalliques, pavage de terre cuite... |
LA RENOMMEE DU BEURRE
Un bilan
d’exploitation et un bilan financier sont établis chaque année pour chaque
ferme du domaine.On y voit ainsi la progression et les
résultats obtenus par les fermiers.
D’après ces résultats, seront calculées la part du propriétaire, celle
du fermier et aussi celle des serviteurs et employés qui reçoivent, en plus de
leurs gages, 6% de cette valeur. Participant au bénéfice de l’exploitation, les
fermiers sont d’autant plus motivés pour obtenir un meilleur résultat.
L'ancienne ferme de la Grande Marche où le comte de Lariboisière installa sa laiterie de Javené. |
UNE ŒUVRE SOCIALE
En avance sur son
temps Ferdinand de La Riboisière croit sérieusement à son œuvre de
modernisation. Il veut en faire également une œuvre sociale : ses fermiers
participeront aux bénéfices.Il obtient de ses fermiers et de leurs serviteurs
un concours intelligent et actif en les faisant associer leurs intérêts à ceux
du propriétaire par la signature d’une convention.Le fermier n'a plus de prix de location à payer et tous les produits de la ferme lui sont laissés, sauf ceux de l'étable que l'on partage. Il doit diriger son exploitation de manière à produire le plus de lait possible...La somme annuelle qui est remise au fermier, comme prix du lait, est au moins égale au montant du fermage antérieur. Ainsi, un fermier qui avait une location de 1000 francs n'a plus rien à payer et est sûr de toucher au moins 1000 F. de son propriétaire...
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Des sommes sont versées à la Caisse
Nationale des Retraites pour la vieillesse et le capital reste aliéné en rentes
viagères incessibles et insaisissables avec jouissance des titulaires à l’âge
de 55 ans, ce qui est une avancée sociale appréciable pour l’époque qui ne
devait pas laisser indifférent.
Son épouse,la comtesse de Lariboisière, née Marguerite Rhoné (1864-1933)ouvrit un hôpital militaire à Monthorin pendant la Guerre 1914-1918. Elle fut décorée de la Médaille d'Honneur pour Belles actions et de la médaille de la Reconnaissance Française.
Ferdinand de La Riboisière
meurt à Paris le 3 mai 1931 – Son corps est ramené à Monthorin afin d’y être
inhumé dans le caveau familial. Les anciens Louvignéens et Javenéens se
souviennent encore très bien de lui et aussi de son fils, Jean, figure locale
particulière en raison de son obésité.Il était le dernier héritier d’une famille
unanimement respectée,ses libations entraînèrent sa déchéance. A sa mort, tout
le patrimoine des La Riboisière fut vendu et dispersé.
Chapelle funéraire de la famille de la Riboisière à Monthorin. |
A Javené, 15 fermes lui ont appartenu.Toutes ces fermes existent encore à l’exception de celle du Petit-Bois-Benier qui fut ravagée par un incendie et qui ne fut pas reconstruite.Quatorze "fermes Lariboisière" émaillent donc encore le paysage de Javené. Vous les reconnaîtrez à leur longue étable aux ouvertures apparemment toutes semblables...
Marcel Hodebert.
Clichés de l'auteur et de la collection des Archives de Fougères.
Droits réservés.
Droits réservés.
1] « La première campagne électorale de Ferdinand de La Riboisière » - de Marcel Hodebert, in Bulletin et Mémoires de la Société Historique et Archéologique de Fougères -
Pour visiter en image le domaine de Monthorin sur le site de l'Inventaire du Patrimoine régional, cliquez sur ce lien:
http://patrimoine.region-bretagne.fr/sdx/sribzh/main.xsp?execute=show_document&id=MERIMEEIA35048673
Fermes Lariboisière de Louvigné-Communauté
http://patrimoine.region-bretagne.fr/sdx/sribzh/main.xsp?execute=show_document&id=MERIMEEIA35048673
Fermes Lariboisière de Louvigné-Communauté