mardi 19 juin 2012

SAINT-FRANCOIS, asile oublié

 LE COUVENT DE SAINT-FRANCOIS




 Promenade au bord de l'étang de Saint-François.
 Circuit des Vieux Châteaux.






       Non loin du Cordon des Druides, caché derrière les frondaisons, le monastère des Cordeliers a gardé son activité spirituelle pendant plus de trois cents ans, de 1440 à 1789. Le site était un havre de sérénité, lové dans l'épaisseur de la forêt, en connivence avec la Nature, comme les asiles de saint François dans les solitudes de La Verna, où il conversait avec la Création.




 Le couvent Saint-François dans les années 1930 :  à gauche, le pavillon ; au centre
 le bâtiment conventuel  sur lequel s'appuyait un cloître et au fond, la chapelle.
 (Archives municipales de Fougères)

     


      Il faut beaucoup d'imagination aujourd'hui pour se représenter l'importance du couvent de Saint-François : chapelle, cloître, bâtiments monastiques encore visibles  vers 1930 ont pratiquement disparu.


     Le couvent des Cordeliers a encore servi de prison pendant la première guerre mais son état n'a cessé de se dégrader et on en a fait une ruine livrée au pillage. Toutefois, il reste encore un pavillon d'époque dans lequel se trouve un escalier de pierre du XVIIè. Ce pavillon a donné lieu à une réfection après 1791 et le pignon qui nous fait face a été plusieurs fois remanié. Au bout de l'avenue qui conduit à l'ancien couvent, une petite maison veille encore, sans doute la loge du frère portier.








 Le pavillon,dernier témoin de l'ensemble monastique, ferme de Saint François.(cl.M Hodebert)


LA FONDATION FRANCISCAINE

    Dès 1440, quelques religieux de l'ordre de saint François d'Assise appelés Cordeliers à la tête desquels se trouve Frère Guillaume Vaurouilllon, érudit et théologien renommé, s'adressent au jeune prince François Ier, fils héritier du duc de Bretagne Jean V et lui demandent l'autorisation d'établir un ermitage dans la forêt. Le prince leur cède un lieu appelé "Pas au Meunier" avec trois journaux de terre (1 ha et demi) et leur accorde la permission de construire une chapelle et des bâtiments à usage d'habitation. Ces premiers religieux venaient sans doute du couvent des Cordeliers de Rennes établi dès 1230.


   D 'abord  simple ermitage, il fut transformé en couvent avec l'autorisation du roi de France Charles VIII octroyée en 1494. La dévotion franciscaine était vive à la cour de Charles VIII et d'Anne de Bretagne : le motif de la cordelière franscaine qui orne le retable de Notre-Dame (fin XVè) dans l'église Saint-Sulpice à Fougères en témoigne.
 
    Les faveurs accordées au couvent par le duc de Bretagne furent confirmées  par les rois de France Charles VIII, Henri II, François II, Henri IV, Louis XIII et  Louis XIV.  François Ier accorda à la communauté une rente de 50 livres ; Louis XIII lui concèda en 1613 sept arpents du marais de Mare-Noire, lui permettant d'y établir un réservoir à poissons, sans doute l'étang actuel, afin de pourvoir à la nourriture des moines pendant les deux carêmes qu'ils devaient observer. L'extrémité de l'actuel étang de Saint-François porte toujours le nom de "Mare-Noire"; ce don impliquait le droit de remettre en état et de faire  fonctionner un moulin, aujourd'hui célèbre à  un autre titre.



 Le moulin de Saint-François. Archives municipales, Fougères.


 LA CHAPELLE SAINT-GORGON  ET L'ORIGINE des ANGEVINES

      Les moines bénéficiaient également des libéralités des particuliers : rentes, franchises, terres et prés, quelques maisons au Bourg-Roger  à Fougères qui formaient "l'Ile Saint-Gorgon ". Là se trouvait alors la chapelle Saint-Gorgon (actuelle rue de la Caserne) : on y venait en pélerinage chaque 9 septembre pour guérir de la goutte.
     L'affluence était telle le 9 septembre que Guillaume de la Fontaine, petit-fils du fondateur Henri Fauvel, obtint du roi Henri III en 1575 l'autorisation de tenir une foire ce jour-là et les jours suivants : c'est, dit-on, l'origine de la foire de l'Angevine à Fougères.



 UNE PETITE COMMUNAUTE

       Les Cordeliers n'ont jamais été  bien nombreux : ils étaient cinq en 1785 et trois en 1790... D'après les rapports établis en 1790, le couvent ne comportait que huit cellules de religieux ; les autres pièces habitables étaient destinées aux hôtes. Il  a compté  quelques frères convers, chargés des services domestiques.
      La vie des moines était vouée à la prière et à l'étude ; ils desservaient la petite chapelle de l'Hermitage à Chenedé, propriété de l'hôpital Saint-Nicolas et pouvaient prêcher dans les paroisses avoisinantes.



        Les dépendances du monastère étaient modestes et la surface exploitée ne dépassait pas celle d'une petite ferme. Les  rentes par dons ou testaments pour fondation de messes rentraient difficilement : les héritiers des donateurs étaient parfois mauvais payeurs.
        Les ressources de la petite communauté semblent avoir été réduites : les inventaires faits par la municipalité de Landéan en 1790 mentionnent peu de biens, peu d'objets précieux. Le produit de la vente des biens du couvent en 1791, y compris  trois têtes de bétail, ne dépassa pas 3000 livres... En avril 1791, le couvent, l'enclos, l'étang, les terres de Saint-François furent adjugés à Julien-Marie Le Harivel.


 UN SITE DE LEGENDE...


    La crédulité populaire attribuait des richesses immenses  à la  plupart des monastères : on croyait qu'ils détenaient des trésors cachés.
     Dans le pays de Fougères, on racontait qu'une statue de saint François en or massif, de grandeur nature aurait été dissimulée par les moines avant leur expulsion et qu'ils avaient enfoui un trésor près de la chapelle de l'Hermitage...
De quoi faire bondir saint François qui fut l'apôtre de la pauvreté matérielle!D'après certains "on-dit", la fameuse statue en or fut jetée dans l'étang ou enterrée au pied d'un grand sapin. On a toujours aimé les fables... Ce qui est certain, c'est qu'en réalité, sans être dans le besoin, les Cordeliers de la forêt n'étaient pas bien riches. En cela, ils étaient en conformité avec la règle de  leur fondateur. 


Calvaire de Saint-François, XVIè, près d'un oratoire en ruines, sur le chemin qui conduit à l'étang.
  Une inscription mentionne le nom de son commanditaire " Mre Jehan  Drouet,  Sr de la Dorisaye"
et la date de 1581. Remarquable par son fût élancé et cannelé et par les sculptures de son socle,
il est classé monument historique.( cl. M. Hodebert)


                                                       Rédaction :  Marcel Hodebert
                                                                  Bertrand Guyon
                                                        Mise en page: JPG.

                                   Sources:- E Pautrel, Bulletin et mémoires de la Société  Archéologique ,Tome LII
                                                        -Archives Départementales d'Ille-et -Vilaine.

    Le CIRCUIT DES VIEUX CHATEAUX dans la forêt de Fougères ouvre de belles  perspectives
 sur l'étang de Saint-François et sur le site des Cordeliers. Le plan du circuit est  disponible à l'Office du Tourisme et sur le site :Fougères Environnement








mercredi 13 juin 2012

DE GUICHEN, l'amiral intrépide

 L'AMIRAL DE GUICHEN,


L'HONNEUR DE LA MARINE ROYALE




L'Amiral de Guichen, portrait signé V.Sveg, Archives Municipales de Fougères.

Ce sera le sujet de la conférence  ouverte à tous proposée par la Société d'Histoire et d'Archéologie du pays de Fougères :
                                  VENDREDI 22 JUIN
          20h30
            URBANISTES




                                 Elle sera  assurée par Claude-Youenn Roussel.

  
   Claude-Youenn Roussel, chercheur et écrivain passionné par l'histoire de la Marine et de la Bretagne est l'auteur ,avec François Jahan animé d'une même passion, d'une biographie qui vient de paraître sur l'amiral fougerais Luc-Urbain du Bouëxic de Guichen :
GUICHEN

L’honneur de la Marine Royale, Paris, Guénégaud, 2012.





       L'amiral de Guichen est né  le 21 juin 1712 au coeur de la haute ville, rue de l'Horloge alors appelée rue du Bayle, à l'ombre du beffroi ; sa mère Julienne-Thérèse de la Jaille appartenait à une famille terrienne  fortement enracinée à Fougères, cité marchande peu portée aux aventures maritimes. Son père, Luc-François du Bouëxic, capitaine au régiment de Béarn, était seigneur de Guichen, près de Rennes. A Fougères, une rue et une plaque commémorative posée sur l'emplacement de l'ancien hôtel familial honorent sa mémoire.





Le sillage de l'honneur et de la valeur





















     Entré dans la Marine Royale à l'âge de 18 ans (1730), il se distingue par ses qualités de stratège et, après plusieurs succès sur les côtes de Guinée et dans les Antilles, il est nommé lieutenant de vaisseau et chevalier de Saint- Louis ; au cours de la guerre de Sept Ans, il participe à la protection de la forteresse de Louisbourg à l'entrée de l'estuaire du Saint-Laurent mais c'est surtout pendant la guerre d'Indépendance des Etats-Unis qu'il s'illustre sur le Ville-de-Paris équipé de 90 canons en remportant la victoire d'Ouessant (1778) contre la flotte anglaise.




                                            Combat de la Dominique, 17 avril 1780,
                                      par Auguste-Louis de Rossel de Cercy (1736-1804).
                                                                          (  PHGCOM, wikimedia commons ) 

                                
     Nommé lieutenant général des Armées navales en 1779, il appareille à Brest en direction de La Martinique avec vingt-deux vaisseaux pour escorter un convoi de quatre-vingt-trois navires marchands et 4000 hommes de troupe. Dans les eaux des Antilles, il affronte à trois reprises la flotte anglaise conduite par l'amiral Rodney,adversaire redoutable.


 Ténacité, Grandeur et Humilité


        Malgré quelques revers, il reprend la mer sur la demande du Roi ;à la tête  de la flotte de Brest, parfois allié contre son gré à la flotte espagnole, il défie à plusieurs reprises  les voiles anglaises. 
    Il ne cesse le combat qu'en 1783 : la paix met fin à une carrière infatigable de 52 ans qui lui vaut une haute distinction : Louis XVI le nomme chevalier de l'ordre du Saint-Esprit, honneur insigne qu'il reçoit avec la plus grande modestie. Il passe ses dernières années à Morlaix où il s'éteint en 1790.



    Les auteurs Claude-Youenn Roussel et François Jahan éclairent d'un jour nouveau cette personnalité discrète,peu connue dans son propre pays, mais originale  et marquante  dans l'histoire de la marine à voile du XVIIIè siècle.

Pour lire l'avis critique  de la Société Française d'Histoire Maritime
cliquez sur ce lien:     http://www.sfhm.asso.fr/ressources_biblio.php

                                                                                                         Pour le Bureau: J.P. G.

Combat d'Ouessant, juillet 1778. Huile sur toile par Théodore Gudin ,
peintre de la Marine, vers 1848.(wikimedia commons)



     La ville de Morlaix marque cet été l'anniversaire de
l'amiral de Guichen
         et  rappelle les Grandes heures de la Marine Royale 
                 en présentant plusieurs expositions:

                 Office du Tourisme, maison à Pondalez, 9, Grand'Rue,
               du 17 juillet au16 septembre, et mairie de Morlaix.


       

 

Morlaix célèbre le tricentenaire de l’Amiral de Guichen

le 16.07.2012
« Morlaix célèbre le tricentenaire de l’Amiral de Guichen » du 17 juillet au 16 septembre 2012.
L’Amiral de Guichen, personnalité emblématique de son époque n’est connu en ce début de XXIème siècle que d’une poignée d’érudits.
Grand stratège, marin valeureux, homme de caractère et de simplicité, il a pourtant marqué autant l’histoire de la Marine Royale que celle de Morlaix.

Des valeurs reconnues

L’occasion était belle de se saisir des objets recueillis par la famille, de l’enthousiasme des conférenciers et de la volonté commune de rendre un hommage officiel à cet homme, incarnation des valeurs bretonnes, où se mêlent courage, goût du risque et de l’aventure, amour de l’inconnu et nostalgie.

Ce sont donc des conférences, des expositions et une cérémonie officielle que la Ville de Morlaix propose aux visiteurs afin de mieux faire connaître la Marine Royale et cet extraordinaire amiral que fut Luc Urbain du Bouexic de Guichen, au service du Roi de France pendant 54 ans.

Guichen, l’honneur de la Marine Royale

Du 17 juillet jusqu’au 16 septembre, venez découvrir à la Maison à Pondalez, une exposition temporaire composée d’objets appartenant à la famille de Guichen et aux collections du Musée de Morlaix. Ils présentés sur les 3 étages de cette habitation typiquement morlaisienne.
Dans les deux premières salles le visiteur découvrira Morlaix, ses activités et ce qu’était la Marine Royale lors de la guerre d’indépendance des États-Unis.
Le visiteur pourra ensuite découvrir le personnage de l’Amiral de Guichen dont l’hôtel particulier des Lances fut démoli lors de la construction du viaduc.
La plupart des objets exposés appartiennent aux descendants de l’Amiral de Guichen et sont présentés au public pour la première fois.

Exposition :La Marine Royale au temps de l’Amiral Guichen

Salle Cornic, Hôtel de Ville- 31 août -16 septembre
En appui de l’exposition consacrée à l’amiral Guichen et de celle, voisine, des ouvrages consacrés à l’art nautique, celle-ci propose un aperçu sur ce qu’était le cadre de vie au sein de la Marine Royale.

Les conférences

La péninsule bretonne, atout de la marine française
Mercredi 5 septembre à 15 h 30
Salle Ange de Guernisac, Hôtel de Ville
Par Henri Bideau, pour jeune public
Avec ses 3 500km de côtes, véritable presqu’île, la péninsule bretonne va retenir l’attention des rois au point de devenir la tête de pont de la marine française. D’une part, afin de protéger l’arsenal du Ponant et la flotte que l’on y construit, le vieux château de Brest et l’accès au port de la Penfeld vont être profondément fortifiés. Ailleurs, c’est toute la Bretagne côtière qui, dans le cadre du « pré carré » imaginé par Vauban, recevra un impressionnant chapelet de fortifications, preuve de son intérêt stratégique.

Des cardinaux à la Chesapeake : le temps de la revanche (1759 - 1781)
Mercredi 7 septembre à 18 h 00
Salle Ange de Guernisac, Hôtel de Ville
Par Henri Logohérel
Au lendemain des désastres de la Guere de Sept Ans, s’amorce une politique de redressement de la puissance française dont la restauration de la Marine royale est un élément essentiel. Déjà, au traité de Paris de 1763, malgré la perte du Canada et de l’Inde, la France a préservé les bases de sa prospérité maritime, en particulier la pêche hauturière et l’économie du sucre. Dès 1763, commence également la réorganisation de la Marine sous l’impulsion de bons ministres, Choiseul, Sartines, de Castries..., avec l’appui déterminant de Louis XVI, le plus marin de nos rois. Un immense mouvement technique et scientifique va faire alors de la Marine royale une marine savante, celle de Bougainville et de La Pérouse, mais aussi une redoutable machine de guerre que des ingénieurs de talent, Borda et Sané, vont doter d’excellents navires dont les frégates et le “74”, le meilleur navire de ligne en Europe. Ce sera alors la revanche au bout du monde sur la Royal Navy au cours de la Guerre d’indépendance américaine et des campagnes de Suffren dans l’océan Indien. Mais cela se fera au prix de si lourdes dépenses que la crise financière emportera l’Ancien Régime

Morlaix et la contrebande de thé
Lundi 10 septembre à 18 h 00
Salle Ange de Guernisac, Hôtel de Ville
Par Philippe Haudrère
Au XVIIIe siècle, les négociants de Morlaix, tout comme ceux des autres ports de la côte du nord de la Bretagne, sont très actifs dans le commerce du thé de Chine, à l’instar du Morlaisien Guilloton, qui écrit en 1735, en réponse à une interrogation du ministre des finances : « Il a plus d’argent à gagner qu’avec les voyages des îles [Antilles] en employant ses fonds dans les marchandises provenant de la Chine. » L’objet de cet exposé est de décrire le circuit du commerce du thé depuis l’achat en Extrême-Orient, le transport sur la longue route maritime vers la France, les conditions du commerce et de la distribution dans le royaume ainsi que dans le reste de l’Europe, enfin d’essayer de mesurer les profits ainsi obtenus.

Gens de mer et marine à voile
Mercredi 12 septembre à 15 h 30
Salle Ange de Guernisac, Hôtel de Ville
Par Henri Bideau, pour jeune public

Avec la création des arsenaux royaux et le développement sans précédent de la marine à voile, la catégorie des gens de mer va s’étoffer de véritables artisans spécialisés et de métiers qui n’avaient encore jamais embarqués. A l’exemple de la frégate, les vaisseaux de ligne des ingénieurs-constructeurs deviendront de majestueuses forteresses maritimes, très fonctionnelles et capables d’embarquer plus de 900 hommes, du menuisier au médecin, du cordier au botaniste, de l’aumônier au peintre de la Marine.
Guichen : l’honneur de la Marine royale
Vendredi 14 septembre à 18 h 00
Salle Ange de Guernisac, Hôtel de Ville
Par Claude-Youen Roussel, à partir de 12 ans
Parmi les brillants officiers généraux de la Marine au XVIIIe siècle, Guichen est peu connu au regard des Suffren, de Grasse et La Motte-Picquet. Pourtant, au cours de ses cinquante-deux ans de carrière dans le grand corps, ce marin confirmé a constamment servi avec courage, compétence et presque toujours réussite.

John Paul Jones et l’amiral de Guichen, marins aux destins croisés
Dimanche 16 septembre à 17 h 00
Par Alain Boulaire, à partir de 12 ans
Salle Ange de Guernisac, Hôtel de Ville
C’est dans le sillage d’un véritable aventurier, le marin John Paul Jones (1747-1792), que l’historien brestois Alain Boulaire nous entraîne. Pourtant rien ne destinait ce fils de jardinier écossais à devenir un des premiers commandants de la flotte de la toute jeune République des Etats-Unis. Pirate pour les Anglais, héros pour les Américains, corsaire pour les Français, John Paul Jones a lui aussi connu un destin maritime exceptionnel.

Le programme des bibliothèques

Présentation de l’ouvrage “Guichen, l’honneur de la Marine Royale”Parmi les brillants officiers généraux de la Marine au XVIIIe siècle, Guichen est peu connu au regard des Suffren, de Grasse et La Motte-Picquet. Pourtant, au cours de ses cinquante-deux ans de carrière dans le grand corps, ce marin confirmé a constamment servi avec courage, compétence et presque toujours réussite.
C’est le déroulement de cette longue et passionnante carrière que les auteurs ont entrepris de retracer à partir d’archives nationales et privées, enrichies de sources anglaises de l’époque, le tout ponctué de rappels éclairants du contexte historique général.
« Marins illustres du 18ème »
Bibliothèque Les Amours jaunes - 1er étage de l’hôtel de Ville
Tous les jeudis et vendredis de 14 h à 18 h et les samedis de 14 h à 17 h (Fermée du 1er au 15 août)
Cette exposition, présente des ouvrages sur les techniques navales au 18ème siècle. Elle rend également hommage à Sufren, Obet, Lamotte-Picquet et bien sûr l’amiral morlaisien de Guichen, grands marins bretons qui ont participé à la guerre d’indépendance des Etats-Unis, à la guerre de Sept ans, aux conflits à terre et sur mer.


Promenade Amiral de Guichen
Cérémonies officielles du 15 septembre 2012
Baptiser un espace public du nom de quelqu’un est toujours un acte chargé de sens. En donnant le nom de l’amiral de Guichen au passage du premier étage du viaduc, la Ville de Morlaix a voulu rendre à l’Amiral de Guichen une existence au cœur de la vie quotidienne des Morlaisiens et des visiteurs qui, nombreux, ne manquent jamais de faire un détour par le passage de cet étonnant ouvrage d’Art.

Dénomination de la promenade Amiral de Guichen
Chaque Morlaisien et visiteur est convié à assister à la cérémonie de dénomination du passage Amiral de Guichen. En présence des descendants de la famille mais aussi de représentants de l’académie de Marine et d’officiels de la marine, c’est à un moment chargé d’émotion et d’histoire que chacun peut prendre part.

1er étage du Viaduc, 16 h

réalisation : GMT Éditions 2011






mercredi 6 juin 2012

RESISTANTS DE TOUS BORDS: Pierre Leroy, Pierre Lemarié



Pierre Leroy.




     Qui se souvient de l’abbé Leroy, mis à part son village natal, Coglès, le quartier de Rocabey à Saint-Malo ou encore la commune de Montreuil-sous-Pérouse ? Une stèle garde mémoire de l’enfant du pays à Coglès, tout près de l’église ; une rue porte son nom à Rocabey et la commune de Montreuil-sous-Pérouse a inscrit  le souvenir de ses activités de résistant à travers une rue et une pierre sculptée. Les générations se succèdent et qui peut garantir qu’à l’avenir ces noms gravés parleront encore du courage extraordinaire de ces hommes et femmes qui ont osé dire « non »? Non à la mutilation de l’homme, à son asservissement, à la barbarie à visage bestial.

 Eglise de Coglès, pays natal de Pierre Leroy.
 Stèle  commémorative près de l'église et du
 monument aux morts,1994.













      Un  ministère actif et rayonnant


         Né à Coglès le 7 avril 1900, issu d’un père maréchal-ferrant, Pierre Leroy est le jeune d’une famille de quatre enfants. Ordonné prêtre en 1923,  il est nommé vicaire au Val d’Izé. Il y restera jusqu’en 1934 : il crée la fanfare La Stéphane et laisse le souvenir d’un prêtre attachant. De 1934 à 1941, il exerce dans la paroisse de Rocabey, forme des militants ouvriers et lance les Hirondelles de la Mer, mouvement affilié à la Fédération Gymnique et sportive des patronages de France. Il crée une bibliothèque paroissiale avec 2500 volumes choisis et achetés par lui. L’image que des témoins gardent de lui, à cette période, est celle d’un homme sensible aux plus démunis.




Montreuil-sous-Pérouse : des faits de résistance


         Enfin, en 1941, l’abbé Leroy est nommé recteur de Montreuil-sous-Pérouse. Les Français viennent de connaître la débâcle, l’arrivée des troupes d’occupation. Les années noires commencent, rythmées par des actes d’héroïsme, de basses compromissions et de viles lâchetés. Sur cette toile d’horizon assombrie, jaillissent tout de même quelques faisceaux lumineux qui permettent de garder confiance en l’homme : Pierre Lemaître, économe à l’hôpital de Vitré qui rejoint le réseau « Alliance » et Pierre Leroy qui exerce la fonction de secrétaire de mairie.


         A ce titre, il délivre aux jeunes des fausses cartes d’identité pour leur éviter le STO (Service du Travail Obligatoire) en Allemagne. Au cours d’une rafle, un jeune révèle l’auteur du faux document qu’il possède. Le 20 avril 1944, une traction vient chercher Pierre Leroy : il est arrêté et sera déporté en Allemagne. Certes il aurait pu fuir, mais il ne voulait pas attirer de représailles sur ses paroissiens.  Interrogé à Fougères, il est emmené à Rennes, à la prison Jacques Cartier, enfermé dans la cellule n°56 réservée aux curés.  Pour lui, comme pour tant d’autres, commençait un long cauchemar.



 Le camp de Neuengamme


         A partir de là, l’abbé Leroy va connaître l’itinéraire et le sort de tant et de tant de déportés. Aux alentours du 10 mai, un convoi l’amène à Compiègne. Le 4 juin, il est dirigé vers l’Allemagne. Grâce aux témoignages de ses anciens camarades, il est possible de suivre Pierre Leroy dans les  camps de déportation. Après trois jours et trois nuits d’un voyage exténuant, il est interné au camp de Neuengamme, près de Hambourg. Travailleur forcé à la briqueterie du camp, il apporte son soutien moral à ses camarades. Les Alliés viennent de débarquer sur les côtes normandes.



Le camp de Misbourg








Arrivée dans les camps :l' Humanité déchirée...
Fonds Résistance, Archives municipales de Fougères.


         Après Neuengamme, Pierre Leroy est transféré à Misbourg-Hanovre. Marcel Sibade, de Perpignan révèle : « Le travail était assez dur et les privations de toutes sortes ne l’avaient pas tellement affaibli, il gardait un moral excellent. L’abbé Leroy célébrait sa messe, presque chaque jour, à laquelle il invitait ses compagnons. » Lui et ses camarades sont employés à creuser les trous des bombes et à déblayer les rues. Jean-Pierre Renouard, de Paris témoigne que tout exercice d’un culte religieux était interdit dans les camps de concentration et que l’abbé Leroy était le seul prêtre au monde  autorisé par les S.S. à dire une messe le jour de Noël. La fraternité pouvait se vivre ce joyeux Noël 44 avec les Français, Belges, Hollandais, Italiens, Norvégiens, Polonais, Danois et Tchèques. Les conditions de vie deviennent atroces : froid rigoureux, manque de nourriture, de vêtements, de sommeil,  poux et brutalité. Au mois de mars suivant, l’abbé Leroy est entré à l’infirmerie et il y resté jusqu’au départ pour Belsen.

Bergen-Belsen

    Bergen-Belsen...l'horreur de la déportation et l'agonie de l'Allemagne, selon les mots de  Simone Veil,elle-même rescapée de Bergen-Belsen (Une vie,Stock,2007) 

         Bergen-Belsen est le rendez-vous avec la mort pour beaucoup de déportés et pour l’abbé Leroy : le camp y est transféré par camion. Le manque de nourriture et le typhus ravagent la population : 60 000 personnes y meurent en avril 1945. L’abbé Leroy est mort d’épuisement et de faim, le 13 avril 1945 et son corps rejoint celui de ses camarades de souffrance dans une fosse commune. Le 17 avril, Les Anglais  libèrent le charnier de Bergen-belsen et brûlent complètement le camp pour éviter la propagation du typhus. Seule subsiste une grande clairière nue, signe des ravages d’une barbarie à visage humain.  Dans l’effroyable silence de la mort, est construit un monument à la mémoire des 450 000 victimes de Bergen-Belsen, hommes, femmes et enfants. Dernière preuve de l’ignominie nazie : un policier de la P.J. de Rennes affirme à Madame Paule Duclos, de Dinan qu’il a lui-même transporté, avec un de ses camarades, le corps de l’abbé dans la fosse commune, alors qu’il était agonisant. 


             Rebelle à toute forme d’embrigadement idéologique, l’abbé Leroy est vraiment quelqu’un de fidèle au meilleur de l’homme et de fraternel avec ses compagnons d’existence, quels qu’ils soient.

                                                    Daniel Heudré 
        
                                                                       Sources:archives privées de la famille Leroy.


 



  Qu'importe comment s'appelle
  Cette clarté sur leurs pas                Pour lire ce poème, il suffit de cliquer ici:
  Que l'un fût de la chapelle
   Et l'autre s'y dérobât                     http://www.poesie.net/aragon4.htm
  Celui qui croyait au ciel
  Celui qui n'y croyait pas
  Tous les deux étaient fidèles
  Des lèvres du coeur des bras

      Aragon, La Diane Française.





 Pierre Lemarié,
 ouvrier-carrier à Fougères,
 communiste résistant.










Pierre Lemarié, deux mois après son retour des camps.
 Fonds Résistance, Archives municipales de Fougères.


                    


        Une Résistance payée au prix fort



            La  résistance à l’occupant allemand prend appui sur des individus d’origines sociales et d’appartenances politiques très diverses. Des ecclésiastiques disent non à une idéologie païenne et raciste. Des communistes refusent  l’asservissement et cultivent une solidarité qui repose sur le secret. Ainsi Thérèse Pierre développe la Résistance dans le pays de Fougères.








            Des noyaux de résistance se constituent, reposant  sur trois piliers. Celui de Fougères a pour chef Thérèse Pierre, épaulée par Léon Pinel et Pierre Lemarié. Son champ d’action s’étend sur Fougères, Saint-Brice et Gosné. Par mesure de précaution, dans la Résistance, on travaille par trois et on connait seulement le nom légal et l’adresse les uns des autres, protégeant ainsi le réseau qui ne pouvait être démantelé.



Une enfance et une jeunesse difficiles



            Pierre Lemarié est né le 13 novembre 1898 à La Chapelle Saint Aubert, dans une famille modeste de 10 frères et sœurs. Il devient carrier et extrait  du sable dans une carrière près du cimetière de Lécousse et de la pierre à Fontaine La Chèze. Le domicile qu’on lui connaît est situé au 7, boulevard Saint Germain, à Fougères. La guerre éclate, Lemarié est prisonnier en Allemagne mais il est libéré le 22 juillet 1941. Au retour, il s’engage dans la Résistance, refuse de devenir chef du triangle de direction de Fougères, préférant des tâches  à la base : rédaction et distribution des tracts. Lemarié n’est pas quelqu’un à se mettre en avant.
             Quel meilleur témoignage que celui de Germaine Guenée rapporté dans le roman de Claudie Hunzinger  « Elles vivaient d’espoir », paru en 2010 aux éditions Grasset ! L’amitié entre Emma, la mère de l’auteur et Thérèse Pierre, future résistante FN,  permet à chacune de s’émanciper et d’affronter les orages de l’Europe. Germaine Guenée déclare que Thérèse, arrivée à Fougères, rencontre, fin septembre 1942, « Pierre Lemarié, de l’Internationale rouge sportive. Dix ans de plus qu’elle… Petit de taille. Petits yeux noirs et vifs. Son atout ? L’explosif » .




  Grand Hôtel des Voyageurs, réquisitionné par les forces d'occupation (Annotation
 de Mme Dulong-Guénée, Résistante) Archives municipales, Fougères. En mai 1945,
quelques déportés, revenus de l'enfer, apparaissent au balcon comme des spectres.

            


Une Résistance active et risquée











         Les activités du triangle s’élargissent à d’autres communes de la campagne : Antrain, Tremblay, La Fontenelle, Bazouges-la-Pérouse, Rimou, Saint-Hilaire-des-Landes et Lécousse. Le triangle se réunit le dimanche pour confectionner les tracts différents selon la ville ou la campagne. L’expérience professionnelle de Pierre Lemarié lui permet de se lancer dans les explosifs et de préparer des attentats. Le film « La bataille du rail » de René Clément, sorti  en 1946, montre bien l’importance des sabotages et des attentats. Bien qu’il façonne une légende d’une France résistante et une image d’Epinal, les images rendent compte très vite des risques et de l’ampleur de la Résistance. Lemarié utilise le dépôt de la carrière de Fontaine La Chèze qui contient les détonateurs et la cheddite. Trois ou quatre cartouches, un détonateur et une mèche de 2 mètres … et  l’engin est fabriqué, prêt à exploser et à détruire. Ainsi la permanence du Rassemblement national  Populaire de Marcel Déat est-elle plastiquée à Fougères. Autre exemple, l’explosion  de la bombe lancée contre le cinéma Le Royal, à Rennes. Enfin, signalons le sabotage des tuyaux de freins d’un train allemand dans la gare de Fougères, le 11 novembre 1942. Ces actes de bravoure inaugurent une forme de résistance beaucoup plus active et aussi plus risquée. 



 
La dénonciation qui fait basculer une vie



           Mais là encore, la délation prend la forme d’un individu dont on ne sait pas grand-chose. Le 30 avril 1943, Pierre Lemarié est arrêté près de la carrière de Lécousse par quatre policiers des renseignements généraux de Rennes. Leur perquisition a d’abord eu lieu chez lui, après avoir interrogé sa fille. Rien de compromettant n’est trouvé au domicile. Mais les policiers savent où aller l’arrêter. Pierre Lemarié est enfermé à la prison de Fougères,  mêlé aux détenus de droit commun. Jamais il n’avouera son appartenance communiste ni son activité de résistant. Lors du jugement à Fougères, il est condamné à 1200 Francs d’amende et à deux ans de prison. Cette peine sera exécutée à Rennes, Blois, Compiègne. A l’issue de cette incarcération, il est conduit aux camps de concentration, le 27 avril 1944.




 Mémorial du camp de Sachsenhausen. Fonds Résistance,"G Boivent  raconte..".
 Archives municipales de Fougères.


Des conditions d’existence bestiales









            C’est alors la descente aux enfers ; Auschwitz où , devenu le n° 185918- chiffre tatoué à vie -, il passe 14 jours atroces puis Buchenwald, Shonebeck. Les Américains libèrent ce dernier camp, au mois d' avril 1945, mettant fin à un martyre. Il revient à Fougères  le 10 mai et y apprend la disparition de son fils  dans les camps. Pierre Lemarié a puisé en lui-même la force de dépasser ces épreuves, car, disait-il simplement, il était habitué à la dure.
                                  

                                     Article : Daniel Heudré

                                     Clichés , mise en page : JPG

                                     Sources: Le pays de Fougères n.21


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