dimanche 21 octobre 2012

MANOIR DE LA CARREE ST-GERMAIN-EN-COGLES






 Le manoir de la  Carrée,peinture de Patrick Dardennes. 




Le manoir de la Carrée
 
La commune de Saint-Germain-en-Coglès est située en Bretagne, à l’extrémité Nord-Est du département d’Ille-et-Vilaine. Nichée dans un canton à l’identité forte, le Coglais, elle conserve un patrimoine architectural de caractère. Son histoire repose sur les familles qui ont exploité la terre et le granit et sur les propriétaires de châteaux et manoirs. Sur ce territoire de légendes, le diable et le Bon Dieu se croisent près des pierres et des fontaines que le randonneur peut apprécier sur de nombreux sentiers.
 

Le manoir de la Carrée dont il ne reste hélas que le souvenir, est devenu au XXe siècle une ruine inspiratrice pour les peintres et photographes de passage. Les cartes postales anciennes témoignent de l’élégance et du cachet de cette demeure de pierre datant de la fin du XVIe siècle ou du début du XVIIe siècle et qui, en 1677, appartenait à François Le Porcher.





 carte postale,début XXe (Coll. M. Hodebert )

 
 
Pour le découvrir, empruntons la rue de l’Eglise et dirigeons-nous vers Le Châtellier en laissant l’édifice religieux à notre gauche. Une tour circulaire avec cheminée et toiture d’ardoises nous accueille. Pénétrons alors dans la propriété par le portail composé de deux piliers de granit haut de plus de quatre mètres. Un chemin de terre, parfois en herbe, guide notre regard sur la face nord du monument qui se dresse devant nous avec ses hautes cheminées et ses toits pointus. Avançons de quelques pas en remarquant sur notre droite un jardin potager dans ses murs et apprécions cette façade certes un peu austère mais homogène par son granit de grand appareil. Sur le corps principal nous distinguons deux parties, l’une avec un étage et une seule fenêtre et l’autre avec quatre grandes fenêtres réparties sur deux niveaux. La toiture ajourée de deux chiens-assis repose sur une belle corniche ouvragée. D’où nous sommes, nous apercevons une cheminée à chaque pignon et une au centre de l’édifice. Les quatre ouvertures du rez-de-chaussée semblent nous inviter à entrer dans l’une des deux vastes salles mais, patience, attardons-nous plutôt sur l’ornement de la porte située la plus à droite. Le linteau et sa belle moulure en accolade sont surmontés d’un petit écu entouré de décors fins. Au-dessus, un écusson est paré d’un fronton triangulaire en relief. ….






La famille du Pontavice de Heussey

 
  Parmi les familles nobles du pays de Fougères, le patronyme du Pontavice est fréquent. Originaire de Tremblay (Ille-et-Vilaine), la Maison du Pontavice a formé plusieurs branches et rameaux dont celle de Heussey dans la Manche. A Saint-Germain-en-Coglès, au xviiisiècle, la famille du Pontavice de Heussey s’installe pour plusieurs générations.



   Avant la Révolution française, la famille est représentée par Julien-Hyacinthe (1712-1793) et son fils Hyacinthe-Laurent (1748-1788) né au manoir de La Carrée en Saint-Germain-en-Coglès. A la génération suivante, Marie-Hyacinthe-Olivier (1788-1873) laissera une empreinte indélébile.


Un personnage atypique
 
De la petite enfance jusqu’à l’âge adulte, Marie-Hyacinthe-Olivier hérite de son aïeul paternel puis de ses tantes paternelles. Ainsi une maison de la rue de la Pinterie à Fougères, les bois du Châtellier et le manoir de La Carrée viennent compléter son patrimoine. Devenu l’époux de Léocadie Guillard de Kersauzic en 1813, il fonde une famille et s’installe à Saint-Germain-en-Coglès. Ses biens en Côtes d’Armor,Ille-et-Vilaine et Finistère sont importants.
 
 Petit cimetière particulier dans les bois de Saint-Germain.

 
    A proximité de son manoir, dans les bois qui lui appartiennent, il fonde un cimetière particulier destiné à ses enfants et sa descendance. Mais pour lui-même, il prévoit une tombe creusée dans un rocher. Ce lieu intriguera la population du moment, sa propre famille et ses domestiques. L’enfant Jean Guéhenno qui, lui aussi, a bien connu l’endroit pendant son enfance le décrira dans un de ses ouvrages. Aujourd’hui, les promeneurs qui s’arrêtent au cimetière du Bois découvrent ces quelques sépultures protégées par des talus et par une modeste croix.

 
De Marie-Hyacinthe-Olivier, le pays de Fougères gardera l’image d’un homme très attaché à ses propriétés, à ses bois et à ses arbres, n’hésitant pas à user sans modération des lois et tribunaux pour obtenir gain de cause. A Saint-Germain-en-Coglès, il reste un personnage atypique, singulier voire légendaire, mais ô combien ! passionnant.


 
HYACINTHE DU PONTAVICE :

 carrière   politique et littéraire

 
Hyacinthe (1814-1876) est l’aîné des enfants de Marie-Hyacinthe-Olivier. Le château de La Haye en Locmaria-Berrien (Finistère), la ville de Tréguier (Côtes d’Armor) puis le manoir de La Carrée sont les domiciles familiaux où il grandit.

 
Ses parents ont probablement décelé en lui une attirance particulière pour la littérature puisqu’il entre au Collège de Sorèze (Tarn) en 1828, à l’âge de quatorze ans. Il y reste trois années scolaires pour étudier la poésie, le latin, la littérature et la rhétorique. Attiré par sa vocation littéraire, il prend la plume et rédige dans ses cahiers ce que son quotidien lui inspire. Et les carnets ne resteront pas dans les tiroirs puisqu’en 1840, il publie à Paris un premier recueil intitulé Nuits rêveuses. Mais lun des deux visages de Hyacinthe est le penseur qui souhaite se mettre au service de ses concitoyens. Il a en effet été influencé par un proche, son oncle maternel Théophile Guillard de Kersauzic qui, de 1822 à 1849, a été mêlé à tous les soulèvements populaires. Hyacinthe a reçu de son oncle des idées sur le sort de l’homme dans la société : droit, liberté, justice, fraternité.


Portrait de Hyacinthe du Pontavice en 1844.
 
 

En 1848, à Tréguier, Hyacinthe devient commandant de la Garde nationale. Mais face au maire légitimiste Paul de Dieuleveult, il entre dans un conflit incessant. Considéré comme un perturbateur, il décide de quitter les Côtes d’Armor et de se rapprocher de Paris en installant sa famille à Fougères. Elu conseiller municipal en 1860, il échouera au conseil d’arrondissement face à Louis Pinot.


 
            L’autre figure de Hyacinthe s’exprime en poésie. Etudes et aspirations première et deuxième séries (1859), Sillons et débris (1860), Poèmes virils (1862) sont ses principaux recueils. Ses pièces se composent d’abord d’une description, qui semble autobiographique, du milieu familial ou d’une destination de voyage. Puis l’auteur se laisse aller à une réflexion approfondie sur ses aspirations et ses regrets. Souvent apprécié par les critiques de son époque, il sera déçu par le microcosme parisien et ne se laissera pas séduire par une proposition de candidature à l’Académie française.

 Il est possible de feuilleter le recueil SILLONS et DEBRIS en cliquant sur ce lien BNF :

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5685469k/f145



Sillons et débris / par H. Du Pontavice de Heussey
 
 
 Ses OEUVRES COMPLETES sont  également accessibles  :
 




    
            L’auteur a échangé quelques lettres avec George Sand mais Hyacinthe est surtout considéré comme le mentor et l’initiateur à la vie littéraire de Villiers de L’Isle-Adam. Il l’aida financièrement et le présenta à Charles Baudelaire et Léon Cladel. Son influence fut marquante et durable sur l’évolution spirituelle de Villiers. D’ailleurs, Isis, l’un des premiers livres de l’écrivain, est dédié à Hyacinthe.


  La cause de Garibaldi


En 1870, atteint par les blessures faites à sa patrie par la guerre franco-allemande, il ne peut rester inactif. A l’aube de ses 56 ans, il propose d’organiser dans la ville de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais) une compagnie de francs-tireurs qu’il équipera à ses frais. La sous-préfecture accepte l’idée et reçoit les engagements des volontaires. Hyacinthe obtient également du gouvernement une commission de capitaine et sa compagnie armée peut alors se préparer à rejoindre la légion formée par Garibaldi. A Boulogne-sur-Mer, des soirées patriotiques donnent des concerts pour soutenir les initiatives de Hyacinthe. Et la presse locale ne manque pas d’éloges envers le gentilhomme breton qui n’hésite pas à sacrifier son existence et sa fortune pour repousser l’envahisseur étranger. Le patriotisme, le dévouement et la générosité du capitaine du Pontavice de Heussey et de ses francs-tireurs sont mis en exemple à imiter. A Fougères, la hardiesse de Hyacinthe est également saluée.


 
C’est à Londres qu’il meurt le 15 mai 1876 dans sa soixante-deuxième année, au terme d’une vie riche en rencontres artistiques et engagements. Une semaine plus tard, la dépouille mortelle est inhumée à Saint-Germain-en-Coglès dans le cimetière de famille. Ainsi s’achève la vie du comte Hyacinthe du Pontavice de Heussey. Perpétuel étudiant, poète talentueux, commandant de la Garde nationale, conseiller municipal, candidat malheureux à certaines élections locales,républicain convaincu.


 
La  postérité


Hyacinthe et son épouse Harriett ont donné naissance à six garçons dont trois arriveront à l’âge adulte : Jules, Robert et Olivier.

 

-          Jules (1848-1928), fréquente le collège de Fougères avant d’être reçu à l’Ecole Polytechnique (1867). Devenu militaire, il évolue dans l’artillerie à Rennes, Vincennes, Grenoble et Lyon. Au cours de cette carrière, il obtient une fonction peu ordinaire puisque pendant onze ans il sera attaché militaire à l’ambassade de France en Grande-Bretagne. A Londres, il côtoie le monde diplomatique, militaire, culturel, scientifique mais aussi les membres de la famille royale. A  56 ans, il est nommé général de brigade.

 

-          Robert (1850-1893), passionné par la littérature, aura une courte carrière puisqu’il meurt à l’âge de 43 ans. Il est l’auteur notamment d’un ouvrage sur Charles Dickens (1889) et d’une biographie sur Villiers de L’Isle-Adam (1893). Un petit ouvrage de Robert, le premier, concerne directement le pays de Fougères : Balzac en Bretagne Cinq lettres inédites de l’auteur des Chouans (1885). Le contenu commente les lettres échangées entre Balzac et Gilbert de Pommereul qui avait reçu le romancier en 1828. Robert repose auprès des siens dans le cimetière familial de Saint-Germain-en-Coglès.




-          Olivier (1853-1933) a grandi à Fougères où il est né et scolarisé. Officier des Haras nationaux, il est à la tête du haras du Pin (Orne) pendant 18 ans. A l’âge de la retraite, il conserve sa passion pour l’élevage et s’installe à Lessard-et-le-Chêne (Calvados) pour produire des pur-sang. Disparu en 1933, l’enfant du pays rejoint le cimetière dans les bois de Saint-Germain-en-Coglès. Avec Olivier, la famille du Pontavice de Heussey a une descendance directe par les garçons jusqu’à nos jours.





Fichier:LaTour d'Auvergne.jpg
La Tour d'Auvergne,bronze
de Carlo Marochetti, Carhaix-Plouguer,
( cl.Paul Barlow, W.Commons)




Seule héritière de  La Tour d'Auvergne,premier grenadier de France, la famille du Pontavice de Heussey a connu tous les honneurs républicains et patriotiques dédiés au grand homme. Dépositaire de l’urne contenant sont cœur, Jules le remet officiellement à l’Etat en 1904 pour qu’il soit déposé aux Invalides.
 


                 Dominique Taillandier


        
Sources :Dominique Taillandier, Manoir de La Carrée la famille du Pontavice de Heussey en terre bretonne, en littérature, sous les drapeaux…, 2011, 312 pages.

                 
www.manoir-de-la-carree.com


 












 

 



jeudi 18 octobre 2012

MEGALITHES IV: LE CORDON DES DRUIDES EN FORET DE FOUGERES


LES MEGALITHES DE LA FORET
DE FOUGERES

 

Le Cordon des Druides

 


 
 
 
   Troisième ensemble mégalithique de la forêt de Fougères de notre parcours : le mal nommé Cordon des Druides. Cet alignement de pierres a peu à voir avec les religieux gaulois,il n’en reste pas moins que sa signification interpelle toujours.

 
L'ALIGNEMENT


   Le Cordon des Druides se situe en forêt de Fougères (parcelles 73, 75 et 77), dans la commune de Landéan. Il est actuellement composé d’un peu plus d’une cinquantaine de blocs de pierres. Certains témoignages font état de 80 pierres dressées, mais elles sont bien difficiles à repérer. En effet, outre le couvert végétal qui empêche l’observation précise, il faut compter avec l’exhaussement du niveau forestier. La cinquantaine de pierres existante n’est plus qu’une épave, ce qui rend d’autant plus délicate toute tentative d’explication, nous y reviendrons.
 
 

 Au milieu des arbres de la forêt de Fougères, le Cordon des Druides
 correspond à un alignement de pierres légèrement sinueux remontant
 au Néolithique.(cl. J. Bachelier, 2012)
 
 

  Plusieurs auteurs, dont P. Bézier, l’abbé Brune, Th. Danjou de la Garenne, font mention de deux débris de cromlechs, ou enceinte, de 7 à 8 mètres de diamètre, composés de blocs de pierre de petite dimension. Mais P. Briand, dans Alexandre des Lumières (2012), a récemment mis en doute la fiabilité de ce type de témoignages, les auteurs se recopiant les uns les autres, certains ne se rendant même pas sur place, tandis que d’autres décrivent ce qu’ils ont lu et non vu. On restera donc réservé sur ces deux cromlechs.

  L’alignement, légèrement sinueux, s’étire sur près de 300 mètres, orienté dans la direction du Nord-Est au Sud-Ouest. Ces blocs sont de tailles et de formes extrêmement variables. Alors que la plus grande atteint près de 2 mètres, elle se situe d’ailleurs à peu près au milieu de l’alignement, quantité d’autres pierres ont été renversées et n’émergent plus du sol que quelques centimètres.

  Indéniablement ces blocs ont été sculptés, quoique certains se soient demandé s’il ne s’agissait pas d’un filon de quartz affleurant naturellement. Arrachées au sous-sol, les pierres ne sont pas finement sculptées, elles ont un aspect « brut ». Il s’agit de blocs en quartz, alors que les allées couvertes, ou dolmens, de la Pierre Courcoulée et de la Pierre du Trésor sont en granit. Le quartz, pierre relativement blanche, n’a pas été choisi au hasard, sa couleur est symbolique.


 
 

 UNE CELTISATION ABUSIVE
 
 

Cet alignement a été rattaché aux Gaulois qui l’auraient utilisé, voire construit, d’où son nom de Cordon des Druides, que l’on trouve au moins à partir du XIXe siècle. À juste titre, Briard parle d’une « celtisation abusive d’un monument mégalithique. » Les Gaulois ne sont pas à l’origine de ces édifices de pierres, les druides encore moins !

Nombre de légendes pourtant s’y rattache et fait écho à ces derniers, en Bretagne comme ailleurs en France. Ainsi, outre le Cordon des Druides de Landéan, nous trouvons un Autel des Druides près du Lac de Servières (Puy-de-Dôme), tout comme au-dessus du pèlerinage du Schauenberg en Pfaffenheim (Haut-Rhin). Non loin de l’étang de la Gravotière se situe La Chaire du Druide (Côte-d'Or) et dans la commune de Trie-Château (Oise) surgit la Pierre des Druides. Jusqu’aux travaux de la seconde moitié du XXe siècle, l’attribution des mégalithes aux Gaulois était classique.

Des Gaulois ont pu vivre à proximité, on a d’ailleurs des traces d’enceintes ressemblant à des fermes sous le couvert forestier actuel, ils ont aussi pu les renverser, les utiliser d’une manière ou d’une autre, mais ils ne sont pas les constructeurs du Cordon des Druides, ce monument date du Néolithique, soit v.  6 500 av. J.-C. à 2 500 av. J.-C.

 

 DE LA FANTAISIE AUX PRUDENTES HYPOTHESES
 

Il existe plus d’une centaine d’alignements en Bretagne, soit simples, soit complexes. Le Cordon des Druides relève de la première catégorie. Leur caractère sacré paraît essentiel, mais quel sens lui donner ? Afin de combler les silences du passé, des théories plus ou moins fantaisistes ont vu le jour.

L’association aux druides a conduit à faire du Cordon un puits religieux traversant les époques. Les forces telluriques ont été appelées en renfort, les pierres dressées constituant autant de « jalons sur l’itinéraire de processions cultuelles ». L’alignement aurait aussi pu former un « "barrage fluidique" pour protéger ces lieux sacrés ». Mais seuls les initiés auraient été à même d’en saisir le sens, capter ses ondes, recueillir ses « bonnes énergies ». Certains y ont même vu un sanctuaire bouddhique, pendant que d’autres estimaient que les cromlechs disparus étaient la preuve d’un culte solaire.

Plus raisonnablement, et ce malgré la disparition de tous les indices, ou presque, nous permettant de comprendre l’origine de ces pierres, les historiens ont cherché d’autres explications, notamment par la comparaison.
 
 
 
 
 
 Parfois couverts de mousses, contrastant avec le quartz, parfois sous la végétation, l’alignement d’une cinquantaine de pierres avait un caractère sacré. On aperçoit ici la plus haute pierre, pratiquement au milieu du Cordon des Druides, elle trône péniblement à deux mètres de hauteur.( cl.J.Bachelier,2012)
 
 
 
 

  La ligne droite vaguement géométrique formée par les pierres pourrait correspondre à une orientation calendaire à finalité religieuse, astronomique, voire astrologique, peut-être utile pour les agriculteurs préhistoriques, plus certainement pour manifester le pouvoir d’une « caste de sorciers, sages ou prêtres » (P.-R. Giot). Toutefois, si l’on admet que le Cordon des Druides était un point de repère, il faut imaginer qu’il n’y avait pas de forêt tout autour, mais cela est maintenant un acquis. La forêt de Fougères est un « champ d’arbres » récent remontant au Moyen Âge. Il convient aussi d’admettre que le groupe dominant qui a décidé de la construction de cet alignement était suffisamment respecté et puissant pour imposer un tel travail de débitage des pierres et de transport. En retour, les travailleurs en attendaient sûrement quelques garanties pour leur au-delà, mais peut-être aussi pour leur ici-bas (récoltes).

Les lieux ont pu être réinvestis par des pratiques païennes, ce n’est peut-être pas un hasard si, au Moyen Âge, la forêt de Fougères a abrité un certain nombre d’ermites. B. Beck s’est demandé si la survivance de telles pratiques, voire la perpétuation de celles-ci, n’avaient pas orienté le choix de Bernard de Tiron de s’installer non loin de là à Chênedet au début du XIIe siècle. Le christianisme aurait ainsi capté la sacralité supposée des lieux, la Croix du Fouteau, près de l’oppidum du Poulailler a certainement connu le même type de processus.

 

 
 Pour conclure, si le Cordon des Druides n’a rien à voir avec les Gaulois, on ne peut lui ôter son caractère sacré. Toutefois celui-ci s’est évaporé au cours des siècles et des millénaires, seuls quelques touristes rendent toujours visite à cet alignement mégalithique, classé par arrêté du 19 décembre 1946, au titre des Monuments Historiques. Ceci n’a toutefois pas suffi pour susciter des études...

 

                                          Julien Bachelier

 
 
 
 

samedi 13 octobre 2012

JULIEN MAUNOIR ET LA RECONQUETE SPIRITUELLE DE LA BRETAGNE


Catégorie: Apôtres et "fous de Dieu"




 Julien Maunoir (1606-1683)
 entre Plévin et Quimper.





 
       Le nom de Julien Maunoir est bien connu dans le Pays de Fougères, son souvenir est  omniprésent à Saint-Georges-de-Reintembault : sa  maison est sanctuarisée, une chapelle de l'église paroissiale lui est dédiée, plusieurs institutions , collège, associations portent son nom. A Fougères,  l'église du Bienheureux Maunoir , un vitrail de l'église Saint-Léonard, une rue, une fresque de Louis Garin  conservent sa mémoire. Mais il  a  surtout marqué  la Bretagne de l'Ouest qu'il a maintes fois parcourue : Quimper, Saint-Pol-de-Léon, PLeyben, Tréguier...  A Plévin où il repose, il est encore  vénéré et la population l'honore de deux pardons annuels. La Bretagne reconnaît en lui l'un des grands apôtres de la  renaissance catholique voulue par le Concile de Trente. Par quelle magie entraînait-il les foules?







 Eglise de Plévin, Côtes d'Armor,dernière mission et
 dernière demeure de Julien Maunoir.



 

 
 

UN GRAND MISSIONNAIRE BRETON 

             

 
 
I- JEUNESSE ET FORMATION
 

          Jésuite, missionnaire infatigable,prédicateur de grande renommée, grammairien bretonnant, Julien Maunoir est né à Saint-Georges-de-Reintembault le 1er octobre 1606 dans une maison transformée en chapelle dès 1662. Ses parents, Isaac Maunoir et Gabrielle Deloris étaient, dit-on, « plus riches des dons de la piété que des biens de la fortune », élevant quelques vaches pour arrondir leur revenu de tisserands, vivant très modestement, ce qui ne les empêchait pas de se montrer d’une charité proverbiale.








   
                                           Maison natale de Julien Maunoir
                 et chapelle attenante,Saint-Georges-de-Reintembault.





 
       Les premiers biographes du Père Maunoir ont laissé, comme souvent dans la vie des saints, des histoires merveilleuses et  naïves destinées à frapper les esprits de l’époque mais transmises de génération en génération jusqu’à nos jours. Ainsi, on raconte qu’un jour le petit Julien, encore enveloppé dans ses langes, tomba des genoux de sa mère sur la pierre de l’âtre de la cheminée. La dalle de granit se faisant aussi molle qu’un oreiller de plumes se creusa doucement afin d’amortir le choc et garda même l’empreinte de la tête de l’enfant...
 

        Comme beaucoup d’enfants de son âge, le jeune Julien a gardé les vaches dans le voisinage du bourg. On dit encore qu'il confiait la garde des bêtes à Dieu et allait prier à l’église. La tradition locale ,prompte à décrypter les vocations précoces, rapporte qu'il dirigeait ses camarades en procession à  la "Croix du Lac" et qu'il les sermonnait déjà...Quoi qu’il en soit, le jeune garçon s'est fait remarquer très tôt par le recteur qui l'a initié au latin et envoyé au collège des Jésuites de Rennes récemment fondé en cette ville à la demande de l’évêque. Remarqué là aussi pour sa piété par le père Coton, ancien confesseur d’Henri IV, il entre au noviciat de la Compagnie de Jésus et est envoyé au célèbre collège de la Flèche  puis il enseigne  les humanités à Quimper (1630 -1633) où il rencontre un prédicateur passionné Michel Le Nobletz, son maître spirituel ; dès lors, il se met à apprendre le breton  avec  beaucoup de facilité . Certaines  fables disent qu'au cours d'un pèlerinage  à la chapelle de Ty-Mam-Doué en Kerfeunten près de Quimper  il avait reçu d'un ange le don  de la langue... Après quatre années de formation théologique, il est ordonné prêtre à  Bourges en 1637.


 
Fichier:Cathédrale Saint-Corentin de Quimper 2005 01.jpg
Le don miraculeux de la langue bretonne à Julien Maunoir
oeuvre de Yann'Dargent, cathédrale de Quimper.
 (cl. Michael Kranewitter,W.Commons)

                        Textes : Marcel Hodebert
                                            Jean-Paul Gallais