LES MEGALITHES DE LA FORET
DE FOUGERES
DE FOUGERES
Le Cordon des Druides
L'ALIGNEMENT
Le Cordon des Druides se situe en
forêt de Fougères (parcelles 73, 75 et 77), dans la commune de Landéan. Il est
actuellement composé d’un peu plus d’une cinquantaine de blocs de pierres.
Certains témoignages font état de 80 pierres dressées, mais elles sont bien
difficiles à repérer. En effet, outre le couvert végétal qui empêche
l’observation précise, il faut compter avec l’exhaussement du niveau forestier.
La cinquantaine de pierres existante n’est plus qu’une épave, ce qui rend
d’autant plus délicate toute tentative d’explication, nous y reviendrons.
Au milieu des arbres de la forêt de Fougères, le Cordon des Druides correspond à un alignement de pierres légèrement sinueux remontant au Néolithique.(cl. J. Bachelier, 2012) |
Plusieurs
auteurs, dont P. Bézier, l’abbé Brune, Th. Danjou de la Garenne, font mention
de deux débris de cromlechs, ou enceinte, de 7 à 8 mètres de diamètre, composés
de blocs de pierre de petite dimension. Mais P. Briand, dans Alexandre des Lumières (2012), a
récemment mis en doute la fiabilité de ce type de témoignages, les auteurs se
recopiant les uns les autres, certains ne se rendant même pas sur place, tandis
que d’autres décrivent ce qu’ils ont lu et non vu. On restera donc réservé sur
ces deux cromlechs.
L’alignement,
légèrement sinueux, s’étire sur près de 300 mètres, orienté dans la direction
du Nord-Est au Sud-Ouest. Ces blocs sont de tailles et de formes extrêmement
variables. Alors que la plus grande atteint près de 2 mètres, elle se situe
d’ailleurs à peu près au milieu de l’alignement, quantité d’autres pierres ont
été renversées et n’émergent plus du sol que quelques centimètres.
Indéniablement
ces blocs ont été sculptés, quoique certains se soient demandé s’il ne
s’agissait pas d’un filon de quartz affleurant naturellement. Arrachées au
sous-sol, les pierres ne sont pas finement sculptées, elles ont un aspect
« brut ». Il s’agit de blocs en quartz, alors que les allées
couvertes, ou dolmens, de la Pierre
Courcoulée et de la Pierre du Trésor
sont en granit. Le quartz, pierre relativement blanche, n’a pas été choisi au
hasard, sa couleur est symbolique.
UNE CELTISATION ABUSIVE
Cet alignement
a été rattaché aux Gaulois qui l’auraient utilisé, voire construit, d’où son nom
de Cordon des Druides, que l’on
trouve au moins à partir du XIXe siècle. À juste titre, Briard parle
d’une « celtisation abusive d’un monument mégalithique. » Les Gaulois
ne sont pas à l’origine de ces édifices de pierres, les druides encore
moins !
Nombre de
légendes pourtant s’y rattache et fait écho à ces derniers, en Bretagne comme
ailleurs en France. Ainsi, outre le Cordon
des Druides de Landéan, nous trouvons un Autel des Druides près du Lac de Servières (Puy-de-Dôme), tout
comme au-dessus du pèlerinage du Schauenberg en Pfaffenheim (Haut-Rhin). Non
loin de l’étang de la Gravotière se situe La
Chaire du Druide (Côte-d'Or) et dans la commune de Trie-Château (Oise)
surgit la Pierre des Druides. Jusqu’aux
travaux de la seconde moitié du XXe siècle, l’attribution des
mégalithes aux Gaulois était classique.
Des Gaulois
ont pu vivre à proximité, on a d’ailleurs des traces d’enceintes ressemblant à
des fermes sous le couvert forestier actuel, ils ont aussi pu les renverser,
les utiliser d’une manière ou d’une autre, mais ils ne sont pas les
constructeurs du Cordon des Druides,
ce monument date du Néolithique, soit v.
6 500 av. J.-C. à 2 500 av. J.-C.
DE LA FANTAISIE AUX PRUDENTES HYPOTHESES
Il existe plus d’une centaine d’alignements en Bretagne, soit simples,
soit complexes. Le Cordon des Druides
relève de la première catégorie. Leur caractère sacré paraît essentiel, mais
quel sens lui donner ? Afin de combler les silences du passé, des théories
plus ou moins fantaisistes ont vu le jour.
L’association aux druides a conduit à faire du Cordon un puits religieux traversant les époques. Les forces
telluriques ont été appelées en renfort, les pierres dressées constituant
autant de « jalons sur l’itinéraire de processions
cultuelles ». L’alignement aurait aussi pu former un « "barrage
fluidique" pour protéger ces lieux sacrés ». Mais seuls les initiés
auraient été à même d’en saisir le sens, capter ses ondes, recueillir ses
« bonnes énergies ». Certains y ont même vu un sanctuaire bouddhique,
pendant que d’autres estimaient que les cromlechs disparus étaient la preuve
d’un culte solaire.
Plus
raisonnablement, et ce malgré la disparition de tous les indices, ou presque,
nous permettant de comprendre l’origine de ces pierres, les historiens ont
cherché d’autres explications, notamment par la comparaison.
Parfois couverts de mousses, contrastant avec le quartz, parfois sous la végétation, l’alignement d’une cinquantaine de pierres avait un caractère sacré. On aperçoit ici la plus haute pierre, pratiquement au milieu du Cordon des Druides, elle trône péniblement à deux mètres de hauteur.( cl.J.Bachelier,2012)
La ligne droite vaguement géométrique formée par les pierres pourrait
correspondre à une orientation calendaire à finalité religieuse, astronomique,
voire astrologique, peut-être utile pour les agriculteurs préhistoriques, plus
certainement pour manifester le pouvoir d’une « caste de sorciers, sages
ou prêtres » (P.-R. Giot). Toutefois, si l’on admet que le Cordon des Druides était un point de
repère, il faut imaginer qu’il n’y avait pas de forêt tout autour, mais cela
est maintenant un acquis. La forêt de Fougères est un « champ
d’arbres » récent remontant au Moyen Âge. Il convient aussi d’admettre que
le groupe dominant qui a décidé de la construction de cet alignement était
suffisamment respecté et puissant pour imposer un tel travail de débitage des
pierres et de transport. En retour, les travailleurs en attendaient sûrement
quelques garanties pour leur au-delà, mais peut-être aussi pour leur ici-bas
(récoltes).
Les lieux ont pu être réinvestis par des pratiques païennes, ce n’est
peut-être pas un hasard si, au Moyen Âge, la forêt de Fougères a abrité un
certain nombre d’ermites. B. Beck s’est demandé si la survivance de telles
pratiques, voire la perpétuation de celles-ci, n’avaient pas orienté le choix
de Bernard de Tiron de s’installer non loin de là à Chênedet au début du XIIe
siècle. Le christianisme aurait ainsi capté la sacralité supposée des lieux, la
Croix du Fouteau, près de l’oppidum du Poulailler a certainement
connu le même type de processus.
Pour conclure, si le Cordon des Druides
n’a rien à voir avec les Gaulois, on ne peut lui ôter son caractère sacré.
Toutefois celui-ci s’est évaporé au cours des siècles et des millénaires, seuls
quelques touristes rendent toujours visite à cet alignement mégalithique,
classé par arrêté du 19 décembre 1946, au titre des
Monuments Historiques. Ceci n’a toutefois pas suffi pour susciter des
études...
Julien Bachelier
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