LE COUVENT DES URBANISTES
RETROSPECTIVE
Le Couvent des Urbanistes a été construit entre 1680
et 1689 pour les religieuses Clarisses arrivées à Fougères dès 1633. Cet ordre
mendiant avait été crée en 1213 par sainte Claire, sœur de François d’Assise,
lui-même fondateur de l’ordre des Frères mineurs ou franciscains.
Les Clarisses dites Urbanistes avaient obtenu
en 1263 du Pape Urbain IV un allègement de la Règle leur permettant de posséder
des biens en commun et d’avoir des revenus réguliers pour assurer leur
subsistance.
Installées d’abord dans une maison de Bonabry en 1633
avec l'agrément du Pape Urbain VIII (bulle du 29-11-1634), puis au Clos-Morel
sur le site de la Retraite, les Urbanistes, dites aussi les « Dames
Sainte-Claire »,font édifier leur couvent dans un champ situé en la
paroisse de Laignelet, nommé « le Champ aux Belles Femmes »,cédé par M.
Le Jeune, sieur de la Tendrais en Parigné, dont la fille était religieuse.
Les Urbanistes se recrutaient dans les familles de la
bonne bourgeoisie et de la noblesse. Les filles d’origine plus modeste étaient
admises comme sœurs converses et assuraient les tâches ménagères. Parmi elles,
Jeanne Le Royer (1731-1798) dite Sœur de la Nativité, originaire de La
Chapelle-Janson, s'est singularisée par son mysticisme et sa prescience de
l'avenir ; ses visions et ses prophéties ont été rapportées par le Père Genest,
alors chapelain des Urbanistes.
Le 27 septembre 1792, les religieuses furent expulsées
du couvent par les autorités révolutionnaires.
UNE ARCHITECTURE CLASSIQUE
Le chevet de
la chapelle et le logis de l'abbesse.(cl. Archives municipales, Fougères)
L'ensemble présente une remarquable unité et une
sobriété très classique. L'édifice élevé sur deux étages est rythmé par des
lucarnes aux frontons triangulaires et curvilignes alternés. Le cloître est
éclairé par neuf arcades surbaissées sauf sur l'aile-Est, inachevée.
Au centre de la façade-Sud, s'ouvrent deux portes
cintrées superposées, correspondant au rez-de-chaussée et à l'étage ; elles
sont disposées dans un discret avant-corps de granit appareillé et soulignées
par un beau jeu d'arcatures ; le couronnement de cette entrée monumentale
porte un médaillon martelé cerné par une ceinture de sainte Claire.
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LES CANTONNEMENTS
MILITAIRES
Pendant la période révolutionnaire, le couvent des
Urbanistes échappe à la vente comme bien national, il est mis à la disposition
de la ville pour y loger les nombreuses troupes de passage, envoyées pour
rétablir l'ordre et pacifier le pays.
Jusqu’en 1815, le couvent reçoit des cantonnements de
troupes de passage qui commettent de nombreuses dégradations. Pour comble de
malheur, cette même année, un ouragan détruit 150 m² de toitures et les troupes
prussiennes d’occupation marquent leur passage.
Un rapport de l’autorité militaire, en 1816, précise
que la caserne est « dans un état de délabrement qui la rend absolument
inhabitable » . Des travaux s’imposent si la municipalité veut obtenir,
comme elle l’a maintes fois demandé, l’implantation d’un régiment à Fougères.
Elle fait alors réaliser, entre 1816 et 1818, les réparations nécessaires et,
en 1821, un régiment de Chasseurs arrive aux Urbanistes. La Ville met à sa
disposition une pièce de terre pour lui servir de champ de manœuvres.
Aux Urbanistes, se succèdent ensuite plusieurs
compagnies d’Artilllerie, des régiments du Génie et de Cavalerie jusqu'au milieu
du XIXe.
LE TRAIN DES EQUIPAGES
Le 12 avril 1874, Fougères est choisie comme ville de
garnison pour les troupes du Train des Equipages, régiment de cavalerie légère
du 10èmeCorps d’Armée. Ce régiment restera à Fougères jusqu’à la
Guerre de 1914-1918, écrivant, 40 années durant, une page d’histoire de la
ville.
Pour le dépôt du matériel, la Ville achète un terrain
de deux hectares au Chêne Vert, lieu encore connu sous le nom de « l’Annexe
» où s’élèvent diverses constructions dont il ne reste plus aujourd’hui que le
grand bâtiment administratif réhabilité en logements et un des deux petits
pavillons de l’entrée. Pour mémoire, en 1921, l'abbé Bridel loue à l'Armée les
locaux désaffectés des granges à matériel et à fourrage pour y installer la
nouvelle Cristallerie, près du Chêne-Vert.
Les« Tringlots » comme les appelaient
familièrement les Fougerais font partie intégrante de la vie de la cité. Les
cavaliers sillonnent la ville et la campagne environnante et participent aux
manifestations festives ou aux opérations de maintien de l’ordre public, comme
au moment des Inventaires des églises en 1906. La rue de la Caserne est
constamment encombrée par les allées et venues des militaires, des chariots de
la caserne, les approvisionnements de fourrage… Les permissions de militaires
font grand bruit dans les parages... Puis les « Tringlots » laissent la
place aux gardes mobiles qui occupent la caserne des Urbanistes de 1924 à 1940.
Le vaisseau
de la chapelle des religieuses a été coupé en deux par un plancher, la pièce
inférieure servait d’écurie, la pièce supérieure de logement. Les anciennes
verrières ont été murées, d’autres fenêtres ont été ouvertes, le clocher a
disparu.(Archives
municipales, Fougères).
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Un appentis
crépi à chaux s'est appuyé sur le logis abbatial à droite ; au cours de la
restauration, on a reconstruit la quatrième travée, beaucoup plus heureuse.
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Après la Seconde Guerre mondiale, la Ville, très éprouvée par les bombardements alliés de 1944, revendique en 1949 la propriété de la caserne des Urbanistes afin d’y loger des réfugiés et des personnes sans-toits. Elle s’en porte acquéreur en 1957 mais n’en prend possession qu’en 1959. En 1961, elle cède gratuitement l’ancien couvent à l’Office public d’H.L.M. qui élève bientôt sur le site plusieurs immeubles.
En 1965, le couvent-caserne est complétement défiguré
et délabré : la municipalité décide de le démolir pour libérer l'espace.
Mobilisés par Albert Bourgeois, pharmacien et conseiller municipal,
quelques Fougerais s'opposent à sa démolition ; leur cause est entendue par le
Ministre de la Culture, André Malraux qui, le 15 juillet 1965,interdit in
extremis la destruction du couvent.
Ouest-France.Archives municipales de Fougères. |
Plusieurs projets de remise en état sont abandonnés.
Enfin la restauration complète est décidée en 1971 par la municipalité M.
Cointat ; orchestrée par Raymond Cornon, architecte des Monuments Historiques, elle
s'étale sur 15 ans. En 1986, les Fougerais découvrent un édifice dont ils ne
soupçonnaient pas le prestige...
Vitraux de la chapelle, oeuvre de l'atelier Job Guével, composition sur le thème de la forêt sur dessin de l'artiste Maria Vieira Da Silva.Paysagisme abstrait. |
Dès 1978, l’Ecole de Musique prend possession de ses
nouveaux locaux, bientôt rejointe par l’Ecole de Dessin et la galerie d'Art
Contemporain Arcade qui y accueille les artistes jusqu'en 2009.
A la fin de l'année 2004, les H.L.M. qui masquent le
monument sont démolis et les Urbanistes s'intègrent pleinement au patrimoine
architectural de Fougères.
Phase finale de la démolition des HLM, Archives municipales de Fougères. |
La plupart des
photographies du régiment de Cavalerie, ont été acquises en 2005 par la Ville
de Fougères qui les a achetées à un photographe rennais M. Rapilliard; lui-même
les avait négociées sur un marché sans savoir de quelle caserne il s'agissait .
Ses investigations l'ont conduit par hasard à Fougères où l'archiviste Marcel
Hodebert les a identifiées . Les négatifs ont été pris à l’intérieur même de la
caserne par un photographe militaire. Cette collection de 67 plaques de verre,
totalement inédites, date des années 1890-1910,elle donne une image
volontairement détendue , parfois cocasse de la vie militaire et elle est un
peu la mémoire de cet espace.
Textes: - Marcel Hodebert
- Jean-Paul Gallais.
Mise en oeuvre de l'exposition aux Ateliers:
- Jean Hérisset-service des Archives municipales.
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